Altérité

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Grand Robert de la langue française : Fait d’être un autre, caractère de ce qui est autre.

Trésor de la Langue Française: Caractère, qualité de ce qui est autre, distinct.

Encyclopédie de la philosophie (pochothèque) : Synonyme de différence. L’altérité est effectivement le contraire de l’identité.

Dictionnaire philosophique d’André Comte-Sponville : Caractère de ce qui est autre, ou un autre. L’altérité, à la différence de l’altération, suppose une relation entre deux êtres distincts. C’est le contraire de l’identité, comme l’autre est le contraire du même.

Dictionnaire historique de la langur française. Le Robert (Alain Rey) :

Est emprunté en philosophie (1210),au bas latin alteritas, dérivé de alter : autre.

Le sens d’emprunt correspond à la notion philosophique, à la fois « diversité » et « altération ». Le mot semble disparaître de l’usage et réapparaître, d’abord en arithmétique au sens de « fait d’être binaire » puis en français classique en 1697 (Bossuet) au sens moderne de « caractère de ce qui est autre ». Il est devenu usuel en philosophie à partir du début du XIX° s., se spécialisant à propos des rapports humains, d’après les emplois didactique de, autre.

Synonyme : Différence. Changement. L’autre. Mon semblable.

Contraire : Egocentrisme. Individualisme. Nombrilisme. Solipsisme*

Par analogie : Autre. Autrui. Bonhomie. Complétude. Distinction. Humanisme. Identité. Ipséité. Incompatibilité. Repli sur soi. Sollicitude. Sujet.

Expressions: Aimer son prochain comme soi-même. Se voir comme un autre.

*Le solipsisme (du latin solus, seul et ipse, soi-même) désigne, d’une part, l’attitude du sujet pensant pour lequel sa conscience est l’unique fondement de la réalité des choses

Un autre, les autres, l’ensemble des hommes par opposition au moi du locuteur et en exclusion de ce moi

*

« Car c’est le trait constant de toute la mythologie petite-bourgeoise, que cette puissance à imaginer l’autre. L’altérité est le concept le plus antipathique au « bon sens » (Roland Barthes)

*

« Il faut se voir soi-même comme un autre…., j’aurais pu être cet autre.. ». C’est ce que nous dit Paul Ricœur dans son ouvrage» Soi-même comme un autre. On retrouve là, au-delà de « l’alter » cet « ego », un des impératifs kantien : « Agis de façon telle que tu traites, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours en même temps comme fin, jamais simplement comme moyen »

 « L’amour ne détruit pas l’altérité, il l’intensifie au contraire, mais en la transformant (…) L’amour implique une certaine altérité, non pas une altérité de l’ordre du lui, qui est exclusion, mais une altérité de l’ordre de toi, qui est réciprocité de présence ». (G. Madiner. Conscience et amour.196)

*

Eloge de l’autre

Andrée Chédid

A force de m’écrire
Je me découvre un peu
Je recherche l’Autre
J’aperçois au loin
La femme que j’ai été
Je discerne ses gestes
Je glisse sur ses défauts
Je pénètre à l’intérieur
D’une conscience évanouie
J’explore son regard
Comme ses nuits
Je dépiste et dénude un ciel
Sans réponse et sans voix
Je parcours d’autres domaines
J’invente mon langage
Et m’évade en Poésie
Retombée sur ma Terre
J’y répète à voix basse
Inventions et souvenirs

A force de m’écrire
Je me découvre un peu
Et je retrouve l’Autre

*

 « l’Autre est notre complétude    (Lacan)

*

 « Aujourd’hui une des questions centrales  à laquelle est confrontée l’humanité est celle de l’altérité. D’une part, la mondialisation produit une proximité croissante entre les êtres et les cultures sans vraiment effacer leurs différences ; d’une part, la société globale génère une sensation de perte de repères, une sorte d’agoraphobie qui incite à reconstruire les murs, des barrières vis-à-vis de- et souvent contre – l’Autre.

C’est ici que la leçon d’Emmanuel Levinas devient de plus en plus actuelle, je dirai même indispensable. Donner un visage concret à l’autre ne va pas bien sûr résoudre tous les problèmes, mais le passage de la catégorie générale à l’individu qui se trouve en face de moi nous protège de la violence collective et illimitée, celle des génocides du terrorisme, de la torture, qui s’exerce toujours à l’encontre des catégories générales abstraites, (Les juifs, les Noirs, les musulmans…).

De plus quand Levinas écrit « l’autre me regarde » il affirme que je suis concerné par le sort des autres, et m’incite à prendre en charge leur destin, à reconnaître ma responsabilité envers eux. Comment traduire un tel précepte en action ? Je pense que ce processus de reconnaissance de l’autre suppose un premier pas, qui est la connaissance. Apprendre la langue des autres, leur histoire, est un point de départ essentiel. Nos programmes scolaires ont toujours été trop ethnocentriques, et nous laissent dans la méconnaissance des autres civilisations….l’exigence éthique se construit autour de la triade : « Je », « Tu », « Eux ». Si le « je » renvoie à l’autoconservation, et le « tu » à l’amour (la philia chez les Grecs), il en faut pas oublier le dernier terme « Eux », c’est-à-dire ceux que nous ne verrons jamais…. (Article paru dans Philosophie magazine N° 28 – Avril 2009 – « Altérité et diplomatie » de Roberto Toscano- Ambassadeur d’Italie en Inde)

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