Conscience

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Adam et Êve découvrant le cops d’Abel. William Blake. 1826. Tate Britain. National Gallery of British Arts. Millbank.

Le Grand Robert de la langue française : Faculté que l’homme a de connaître sa propre réalité et de la juger. La partie de la vie, de l’activité psychique dont le sujet a une connaissance intuitive. Connaissance intuitive par l’être humain ce qui est le bien, de ce qui est le mal et qui les poussent à porter des jugements de valeur morale sur ses propres actes.

Encyclopédie de la philosophie, Pochothèque : Etre conscient, cela revient en effet à agir, sentir, penser et savoir qu’on agit, qu’on sent ou qu’on pense. On appelle donc conscience la connaissance intuitive, le sentiment (plus ou moins clair)  qu’un sujet possède de lui-même. Ainsi en français on appelle conscience l’instance qui dans le sujet juge du bien et du mal.

Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Lalande : intuition (plus ou moins complète, plus ou moins claire) que l’esprit a de ses actes. Cette définition ne peut être qu’approximative, le fait de la conscience étant, une des données fondamentales de la pensée…

Ces définitions laissent intacte la question de savoir si l’esprit humain a conscience de tout ce qui le constitue…

Dictionnaire Universel Furetière (1690) : Témoignage, ou jugement secret de l’âme raisonnable, qui donne l’approbation aux actions qu’elle fait qui sont naturellement bonnes. & qui luy fait un reproche ou qui luy donne un repentir des mauvaises.

La conscience est ce que nous dicte la conscience naturelle, la droite raison, un bon Chrestien doit avoir conscience délicate, timorée, & n’avoir rien sur sa conscience, il doit avoir un Directeur de conscience, il doit faire son examen de conscience  tous les soirs, un scelerat à un perpétuel remords  de conscience, il a un ver de conscience qui le ronge, une conscience cautérisée.

Conscience signifie aussi, scrupule, doute & incertitude qu’on a de ce qui est bon ou mauvais

Cas de conscience : il n’y a point de tribunal plus severe que celuy d’une bonne conscience; on l’appelle autrement, for intérieur …..

Conscience, se dit aussi du secret du cœur. Cet homme décharge sa conscience, il a dit tout ce qu’il avoit sur la conscience

Dictionnaire philosophique d’André Comte-Sponville : La conscience est présence à soi de l’esprit ou de l’âme, comme une pensée qui se pense : un savoir qui se sait, une croyance qui  se croit, une sensation ou un sentiment qui se sentent… Toute conscience suppose en cela une certaine dualité…

Dictionnaire historique de la langue françaide. Le Robert. (Alain Rey) : est emprunté (vers 1165) au latin conscentia dérivé de conscire, de cum (avec) et scire « savoir », propr ment savoir en commun. Conscientia désigne donc la la connaissance partagée avec qqn correspondant au grec suneidêsis oscillant entre les valeurs de « confidence » et « connivence ». Appliqué à la connaissance de soi-même, il a pris un sens moral.

Le mot a été repris avec sa valeur morale, « connaissance intime du bien et du mal »

Synonyme : For intérieur. Intériorité. Sens moral. Scrupule. Voix intérieure.

Contraires : Inconscience. Insouciance. Sans loi ni foi.

Par analogie : Abel. Activité psychique. Âme. Analyse. Bien. Bon. Caïn. Cogito ergo sum. Conscentia. Cœur. Contrition. Doute. Emotions. Ethique. Être conscient. Honneur. Idée. Impératif catégorique. Intuition. Jugement. Mal. Mauvais. Méditer.  Moi – ça. surmoi. Morale. Mœurs. Pénitence. Petit juge. Probité. Psyché. Regret. Remord. Repentir. Représentation. Secret. Sensations. Sens moral. Sentiment. Sérieux. Soin.

Expressions : Avoir conscience de. Avoir la conscience tranquille. Avoir un poids sur la conscience. Bonne, ou, mauvaise conscience. Cas de conscience. Conscience collective. Conscience innée. En pleine conscience. En votre âme et conscience.  Examen de conscience. La voix de la conscience. Liberté de conscience. Par acquit de conscience. Prendre conscience de. Se donner bonne conscience. Soulager sa conscience. Troubles de la conscience. Un directeur de conscience.

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Pour Husserl l’intuition c’est la présence de « chose » en personne à la conscience.

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« Nul ne montre très volontiers le fond de sa conscience »  (Schopenhauer. Le fondement de la morale. § 6)

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 » Cette voix de la conscience proclame à quiconque dans l’intimité de son âme, la valeur absolue de loi morale et de l’impératif catégorique » (Dictionnaire de la philosophie. Pochothèque)

« Je ne ferai rien pour l’opinion, tout pour ma conscience je croirai agir sous le regard de tout le monde chaque fois que je le ferai devant ma seul conscience ».  (Sénèque. La vie heureuse. § XX.4)

« Toute prise de conscience est-elle libératrice  pour l’homme? » Sujet Bac Philo Juin 2007.

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Plus on est autonome, plus on a des choix à faire (voir  Kant, voir existentialisme).

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Antonio « – La conscience,  seigneur, où la nichez-vous, Si c’était une engelure elle m’obligerait à mettre des pantoufles, mais je ne sens pas cette déité dans mon cœur ». (La tempête. Acte II, Scène 1. Shakespeare)

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« …Les prêtres d’Espagne, pour la plupart proches du peuples …durent mettre leur soutane par-dessus leur conscience. Nombreux furent ceux qui le payèrent de leur mort »  (Lydie Salvayre. Pas pleurer. Prix Goncourt 2014. Seuil)

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« L’homme a trop longtemps considéré ses penchants naturels d’un regard mauvais, de sorte qu’ils ont fini par s’amalgamer en lui à la mauvaise conscience »  (Nietzsche)

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« La conscience est une chose dangereuse qui d’un homme fait un poltron. Un homme ne peut voler sans qu’elle l’accuse ; il ne peut blasphémer sans qu’elle l’arrête, il ne peut pas mentir à la femme de son voisin, sans que cette conscience le dénonce. La conscience est un esprit à la face rougissante, qui se mutine dans le cœur de l’homme et le remplit d’obstacles. Elle m’a fait une fois restituer une bourse d’or que j’avais eu la chance de trouver. Elle ruine tout homme qui la conserve. Les cités la chassent comme un danger. Chaque homme ayant l’intention de bien vivre, doit n’obéir qu’à lui-même et s’en passer ». (Shakespeare. Richard III. Acte I. Scène IV)

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«  On ne sait pas programmer la conscience d’une I.A. parce qu’on ne sait pas comment fonctionne la conscience »  (Réplique sans le film Transcendance)

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Dans la critique de la raison pratique, Kant, place au cœur de son éthique, la conscience, entendue comme voix intérieure, et qui se manifeste par un sentiment pur, (le respect), qui s’oppose aux inclinations sensibles qui affectent l’animal humain. Cette voix de la conscience, proclame à quiconque dans l’intimité de son âme, la valeur absolue de la loi morale.  (Luis)

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Pour Montaigne « la voix de la conscience » n’est rien d’autre que l’ensemble des principes et des opinions qui sont inculqués chez les différents peuples à l’esprit malléable des enfants, comme la règle de ce qui est juste et équitable. Oubliant la façon dont ils les ont appris, les hommes considèrent ensuite ces principes comme naturels et innés. Ils ne sauraient les envisager comme venant de l’extérieur lorsqu’ils les retrouvent en eux-mêmes.  (Luis)

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« La conscience n’est rien d’autre que la voix du troupeau qui est en nous » (Nietzsche)

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« …J’ai beau tricher et fermer les yeux de toutes mes forces…, il y aura toujours un chien perdu qui m’empêchera d’être heureuse ».  (Jean Anouilh. La sauvage)

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« Je ne saurais survivre à un divorce entre ma parole et ma conscience qui ont toujours fait un excellent ménage »  (Miguel de Unamuno.  Extrait du Discours de Salamanque 1936)

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« Des gens religieux, de toute croyance, n’entendent fréquemment par le mot de conscience rien d’autre que les dogmes et les préceptes de leur religion et l’examen qu’ils font d’eux-mêmes sous ce rapport ; et c’est vraiment dans ce sens qu’on prend les expressions de  conscience morale  et liberté de conscience. Les théologiens, scholastiques et casuistes du moyen âge et de l’époque postérieure, l’ont compris de même. Pour eux la conscience d’un homme c’était tout ce qu’il savait des dogmes et canons de l’Eglise, avec la résolution de les admettre et d’y obéir. D’après cela la conscience avait diverses formes selon qu’elle était hésitante, opinante ou égarée, etc., et on se donnait un directeur de conscience pour la redresser. …Tout cela n’est pas pour confirmer la réalité de cette notion et a donné lieu à cette question : y a t-il vraiment une conscience innée ? (Le fondement de la morale. Schopenhauer. 1851)

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Puis il descendit seul sous cette voûte sombre

Et quand il fut assis sur sa chaise dans l’ombre

Et qu’on eut sur son front fermé le souterrain

L’œil était dans la tombe et regardait Caïn.

Avec ce poème « La conscience » Victor Hugo, avec d’autres grands écrivains, comme Balzac et Zola, va marquer les inconscients populaires dont nous sommes les héritiers.

Hugo nous dit là,  que les actes qui nous échapperaient, sont à la base d’une morale.  Conscience morale que nous avons assimilée, avec ces actes vont assaillir  notre conscient, ce sera regret, repentir, remord. Caïn n’était sûrement pas un véritable assassin, sinon il dormirait du sommeil  des brutes inconscientes.  (Luis)                                                                        

La conscience est souvent ce combat du comment « être moi ».

Introduction au débat : «  Qu’est-ce que la conscience ? »

   Le thème est introduit avec ce poème de Victor Hugo intitulé, La Conscience, lequel se termine par : « L’oeil était dans la tombe et regardait Caïn ! » Ce dernier vers exprime un aspect de la conscience morale.La conscience nous met face à nos actes, par le remord, le regret, ou le repentir. Conscient de son acte, l’homme assailli par le remord ne peut « se débarrasser du poids de la faute ». Le regret étant de déplorer un évènement. Le  repentir étant acceptation de la faute, et  recherche du pardon qui nous en délivre, pour avoir, notre conscience en paix ! 

   Dans les premières grandes civilisations, il  n’y a, avec le corps, l’âme, ce « souffle qui anime le corps, c’est le principe vital de l’activité consciente. Les Grecs lui donneront le nom de « Psyché », ce souffle qui survivait au-delà de la mort. Puis Démocrite énoncera un  principe d’intériorité, « Le dialogue de l’âme avec elle-même », « l’Etre se prenant lui-même à témoin », ce que les Romains vont appeler conscienta. La religion et la philosophie scholastique maintiendront dans l’âme la notion de sens moral, issue des seules  règles divines. 

   Avec la Renaissance l’idée de conscience  s’affirme à côté de celle de l’âme ; Rabelais nous rappelle que « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». C’est Descartes qui donnera son « statut officiel » à la conscience avec le « Cogito ergo sum », (Je pense donc je suis). L’homme restera longtemps avec la dualité de l’âme et de la conscience, d’où cette expression ambiguë  encore utilisée aujourd’hui :« En votre âme et conscience ».  (Luis)

 « La République assure la liberté de conscience » : Loi de 1905, séparation des Eglises avec l’État. Longtemps les religions, avec le clergé, ont été les directeurs de conscience du peuple. Les députés qui ont voté en toute conscience cette loi ont été excommuniés par le Pape.!  (Luis)

Conscience morale :

Au printemps 1940, quand les nazis envahirent le nord de la France, une bonne partie de la population juive tenta de partir vers le sud. Pour franchir la frontière, les fugitifs avaient besoin de visas pour l’Espagne et le Portugal. Avec une nuée d’autres réfugiés, des dizaines de milliers de juifs assiégèrent le consulat portugais de Bordeaux dans un effort désespéré pour obtenir le bout de papier salvateur. Le gouvernement portugais avait interdit à ses consuls en poste en France de délivrer des visas sans l’accord préalable  du ministère des affaires étrangères, mais le consul de Bordeaux, Aristide de Sousa Mendès, décida de passer outre, faisant fi de trente ans de carrière diplomatique. Alors que les chars nazis s’approchent de Bordeaux, Sousa Mendès et son équipe  travaillèrent sans relâche dix jours d’affilée prenant à peine le temps de dormir  à seule fin de délivrer des visas et tamponner des bouts de papier ; Sousa Mendès distribua des milliers de visas avant de s’écrouler.
Acte héroïque avec pour seule arme un tampon de caoutchouc, il va sauver 30.000 personnes.

On lui donnera parfois le nom de « l’ange au tampon de caoutchouc » (Luis)

« Conscience ! conscience ! instinct divin, immortelle et céleste voix ; guide assuré d’un être ignorant et borné, mais intelligent et libre ; juge infaillible du bien et du mal qui rend l’homme semblable à Dieu » (J. J. Rousseau. Profession de foi du vicaire savoyard.)

Si nous investissons trop dans le développement de l’I.A. et trop peu dans celui de la conscience humaine, l’I.A. trop sophistiquée des ordinateurs pourrait simplement servir à amplifier la bêtise naturelle des humains » (Yuri Noah Hariri. 21 leçons pour le 21 ème siècle. P, 88)

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