Croire, croyance

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Le phénix renaissant de ses cendres. (Détail). Bestiaire d’Aberdeen? XIIème siècle.

Le Grand Robert de la langue française : Tenir pour véritable, donner une adhésion de principe à (sans avoir de preuve d’évidence formelle). Avoir une attitude d’adhésion.  Ne pas en croire en croire ses oreilles.

Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Lalande : Au sens faible et large, il est l’équivalent d’opinion, et désigne un sentiment imparfait, qui, comme l’opinion, comporte tous les degrés de probabilité.

Dans les diverses acceptions le terme croyance a une portée plus psychologique que logique, désignant lui-même, plutôt un fait subjectif, un état d’âme individuel qu’une affirmation dont on puisse donner des raisons logiques adéquates et communicables.

Si l’on considère l’affirmation comme simple fait psychologique, ce fait peut évidemment avoir des causes en dehors des raisons et l’on concevra qu’une affirmation sans réserve puisse se produire en dehors des cas où elle se caractériserait comme certitude ou savoir. ….

Encyclopédie de la philosophie, Pochothèque : (Croyance) Etat subjectif qui s’oppose au doute, mais qui reste à l’état de certitude. Locke la défini comme la forme la plus intense que peut avoir l’assentiment concernant ce qui est considéré comme seulement probable. Croire dur comme fer.

Synonyme : Accepter. Accroire. Adhésion. Admettre. Ajouter foi. Avaler. Crédibilité. Gober. Prêter foi à. Se fier.

Contraires : Douter. Démentir. Impiété. Incrédule. Nier. Protester. Réfuter. Révoquer. Soupçonner.

Par analogie : Abuser. Affirmation. Agnosticisme. A priori. Assentiment. Bigote. Certain. Certitude. Confiance. Considérer. Convaincre. Conviction. Créance. Charlatan.Credo. Crédulité. Déisme. Démontrer. Dévot. Dogme. Estimer. Foi. Grâce suffisante. Grâce efficace. Idéologie. Juger. Marcher. Métaphysique. Miracle. Naïveté. Pagabisme. Pari de pascal. Paroissien. Persuader. Plausible. Préjugé.  Preuve ontologique. Prouver. Raconter. Reconnaître. Sembler. Scepticisme. Subjectivité.Se railler. Supposer. Être sûr. Transcendance. Tromper. Véridique.

Expressions : Ajouter foi. Avaler la pilule. Avoir la foi du charbonnier. Credi qui absurdum. Croire au Père Noël. Croire avec la foi du charbonnier. Croire dur comme fer. Croire en sa bonne étoile. Croire sur parole. Être dupe. Faire accroire. Faire prendre des vessies pour des lanternes. Mordre à l’hameçon. Ne pas en croire ses yeux (ses oreilles). Nullius in verba (Ne croyez personne sur parole). Parole d’Evangile. Prendre pour argent comptant. Prêter l’oreille à. S’en laisser accroire.

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« Chacun croit en  ce qu’il croit » (Miguel de Unamuno)

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 » Les enfants croient au Père Noël, les adultes, eux, ne croient pas au Père Noël, ils votent » (Pierre Desproges)

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« Le premier pas ves la philosophie, c’est l’incrédulité » (Diderot)

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« Penser une chose n’est pas y croire » Extrait de 2084. Boualem Salam. Gallimard 2015)

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« Le plus grand dérèglement de l’esprit, c’est de croire des choses parce qu’on croit qu’elles soient, et non parce qu’on a vu qu’elles sont en effet »  (Bossuet. Traité de la connaissance de Dieu)

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«  Babinski sourit :

– Entendre des défunts n’est pas le genre de choses qui arrivent, Mademoiselle,

– Pouvez-vous me dire exactement pourquoi je suis ici (internée)

– la réponse n’est-elle pas évidente ?

– On accepte bien qu’une jeune fille ait vu la Vierge à Lourdes.

– Il n’ s’agit pas de la même chose.

– Pourquoi ? Pour quelle raison est-il  accepté de croire en Dieu, et inconvenant de croire aux Esprits ?

– La croyance et la foi sont une chose. Voir et entendre des défunts, comme vous le prétendez est anormal.

…..

– Nous avons des raisons de penser que vous souffrez sans doute d’un dérèglement.

– Je ne souffre de rien. Vous redoutez juste ce que vous ne comprenez pas….

(Victoria Mas. Le bal des folles. Livre de poche 2019)  

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« Si Dieu existe qu’il le prouve, et s’il n’existe pas qu’il ait le courage de l’avouer ».  (Pierre Dac)

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« …la grande masse de nos croyances qui nous guident dans notre vie quotidienne sont tout bonnement des expressions du désir, corrigées de ci de là, en des points isolés, par le dure choc de la réalité. L’homme est essentiellement un rêveur, se réveillant quelquefois sous l’influence de quelque élément importun du monde extérieur.. » (Essais Sceptiques. Bertrand Russel)

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 « Certains cyniques s’accordent sur le fait que l’unique secret qui sert de socle aux croyances surnaturelles est leur utilité sociale »  (La vie éternelle. Fernando Savater)

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« Ce que la bouche s’accoutume à dire, le cœur s’accoutume à le croire » (Baudelaire. Curiosités esthétiques)

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«  Nullius in verba », ne croyez personne sur parole » (Francis Bacon)

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« Con las creencias propriamente no hacemos nada, sino simplemente estamos en ellas…La creencia es quien no tiene y sostiene a nosostros. Frente a frente son, estos dos terminos, creencias y occurencias.. ».                                              

«  Avec les croyances nous ne faisons proprement rien, sinon que nous sommes en elles….La croyance est ce qui nous tient, nous soutient. Face à face, ces deux termes sont croyances et occurrences »  (Ortega y Gasset. Ideas y creencias)

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« Chacun croit fermement

Ce qu’il craint et ce qu’il désire »

La Fontaine.

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La foi du charbonnier :

« Le diable un jour demanda à un malheureux charbonnier: Que crois-tu ?

Le pauvre hère répondit :Toujours je crois ce que l’Église croit.

Le diable insista :Mais à quoi l’Église croit-elle ?

L’homme répondit :

–    Elle croit ce que je crois »

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« Le libertin n’a ni croyance, ni incroyance » (Geoffroy Vallée)

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« Croire, c’est savoir qu’on croit, et savoir qu’on croit, c’est ne plus croire »  (J. P. Paul Sartre. L’être et le néant. P, 104)

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« J’entends crier de toutes parts à l’impiété. Le chrétien est impie en Asie, le musulman en Europe, le papiste à Londres, le calviniste à paris, le calviniste en haut de la rue saint jacques, le moliniste au fond du faubourg saint Médard. Qu’est-ce donc qu’un impie ? Tout le monde l’est-il ou personne ? »  (Diderot. Pensée philosophique XXXV)

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Dans la ferme des animaux le corbeau Moïse est au service du maître de maison Mr Jones : « Moïse…était apprivoisé, …il avait la langue bien pendue. A l’en croire, il existait un pays mystérieux ; dit Montagne de Sucrecandi où tous les animaux vivaient après la mort. D’après Moïse, la Montagne de Sucrecandi se trouvait au ciel, un peu au-delà des nuages… »

« Les animaux haïssaient Moïse à cause de ses sornettes, et parce qu’il n’avait pas à trimer comme eux, mais malgré tout certains se prirent à croire à l’existence de cette Montagne de Sucrecandi… »  (La ferme des animaux. Georges Orwell)

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 « L’homme a créé les dieux, l’inverse reste à prouver » (Serge Gainsbourg)

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« L’on serait assez tranquille en ce monde , si l’on était bien assuré qu’il n’y a rien à craindre dans l’autre : la pensée qu’il n’y a point de Dieu n’a jamais effrayé personne, mais bien celle qu’il y en a un, tel que celui qu’on le peint »  (Pascal. Pensée IX)

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Dans le film I.Origins, une personne pose la question de savoir si les personnes qui ont la croyance en une divinité n’auraient pas par mutation dans le temps accéder à un sens en plus affiné ?

« – Professeur Grey, êtes-vous croyants ?

   – Est-ce que je suis croyant ?Non ! Je ne suis pas croyant.

   – Pourquoi vous ne l’êtes pas ?

   – Le religion est fondée sur des textes écrits par des hommes, il y a des milliers d’années, ces convictions ne peuvent être changées, elles sont figées. Dans le domaine des sciences , des savants ont écrit des choses, il y a longtemps aussi et de nouvelles générations ont profité de ces avancées. Mais les mots ne sont pas sacrés. Einstein est un homme brillant, mais il n’est pas notre Dieu. Il est une étape dans l’évolution du savoir… »  «  Que feriez-vous si un argument spirituel réfutait vos convictions scientifiques ?    (Extrait du Film, I. Origins. 2014)

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« La croyance c’est ce que je ne pas argumenter »  (Luis)

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Pour le philosophe anglais Bertrand Russel, comme pour bien d’autres philosophes la plus grande partie de notre savoir relève de la croyance.  Ce dernier illustrait son propos avec la théière en orbite entre Mars et la Terre. Il l’expliquait ainsi: « Si l’existence d’une théière était affirmée dans les livres anciens, enseignée comme vérité sacrée tous les dimanche matin, et inculquée dans l’esprit des enfants à l’école, hésiter à croire en son existence serait une excentricité au vaudrait au sceptique les soins du psychiatre  dans une époque éclairée ou de l’inquisiteur dans des temps plus reculés ».  (Essais Sceptiques. Bertrand Russel)

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 » Les croyances sont les moulins à vent de la bêtise » (Raphaël Enthoven. Philo magazine Fevrier 2009)

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  Qu’une cause parmi les causes possibles soit cause première, reste pour le sceptique l’argument circulaire, le cercle vicieux ou diallèle des anciens. Son scepticisme, par contre,  le rend accessible à toute explication qui pourrait être prouvée par l’expérience.

   Ce qui pourrait se résumer par : celui qui ne croit pas,  est celui qui refuse que le néant et l’infini échappe à toute cause saisissable. Il en ressort que celui qui croit le moins devient celui qui croit le plus.  (Luis)

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« Le critère d’une croyance n’est pas conformité avec le « fait », puisque nous ne pouvons jamais atteindre le fait en question ; son critère est sa possibilité de favoriser la vie et à réaliser nos désirs ».  (Essais sceptiques. Bertrand Russel)

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«  Si on en croit une enquête faite pout « Time » Cinquante trois pour cent des nord-américains attendent le retour imminent de Jésus-Christ… » (La vie éternelle. Fernando Savater. Page 224. Seuil 2009)

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Croyance et scepticisme : En 1884 William James publie dans Essays in Radical Empirism), écrit : « Puisque somme toute, nous ne sommes pas sceptiques, nous pourrions faire un pas de plus et nous avouer sans fard les uns aux autres les motifs de nos divers croyances. J’avouerai franchement les miens ; je ne puis m’empêcher de penser qu’au fond elles sont d’espèces esthétique et non logique. J’ai l’impression que l’univers entièrement expliqué me suffoque par son infaillible et impeccable régularité qui pénètre partout. Sa nécessité sans possibilité, ses rapports sans sujet me donnent l’impression d’avoir signé un contrat sans réserver mes droits, ou plutôt de devoir vivre dans une grande pension au bord de la mer sana avoir ma chambre à coucher où je pourrais me reposer de la société et de l’endroit… » (Essais Sceptiques. Bertrand Russel)

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« La crainte intervient certainement dans ce qui conduit l’homme à chercher un soutien extérieur à lui-même, et l’homme primitif trouve à s’effrayer de beaucoup de choses ; tribus ennemies, animaux dangereux…, calamités de toute sorte d’un milieu physique inconquis. La peur n’est cependant pas la seule source de religion à considérer. Si nous pouvons tirer quelques déductions des mythes ayant pris corps dans tous les peuples, l’étonnement envers un monde aux scènes impressionnantes, n’ont pu manquer de contribuer autant que la peur, à la tendance de l’homme le disposant à peupler le monde divinités. Ces dieux, ces esprits accomplissaient toutes choses que l’homme ne pouvait accomplir avec des moyens ordinaires.., de là, la conviction, au moins obscurément conçue, de ce que les mystères de la nature requièrent une explication supra-humaine. La religion a ainsi pris naissance, de la crainte, de la curiosité, de la terreur, mais aussi d’une nécessité morale.

Un esprit ignorant n’aurait pas été à même  de bien distinguer entre les ordres édictés par le groupe social et les ordres édictés par les puissances invisibles : on en vint à énoncer des ordonnance humaines à l’enseigne du : « Ainsi dit le seigneur ! » (Les sources de la morale occidentale. Georgia Harkness. Payot. 1954)

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« La faculté que nous avons de nous manipuler nous-mêmes pour que ne vacille point le socle de nos croyances est un phénomène fascinant »  (L’élégance du hérisson. Page 113)

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La foi c’est « la volonté de croire sans preuve et contre les preuves.. ».. » Il n’y a qu’une foi c’est de se garder libre »… « Il n’y a qu’un seul devoir qui est de penser ; qu’une seule vertu, qui est vouloir ; qu’un seul bonheur qui est agir. Les trois vont ensemble, puisque, nul ne peut vouloir sans faire, ni penser sans vouloir » (Alain)

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Pour le philosophe anglais Bertrand Russel, comme pour bien d’autres philosophes la plus grande partie de notre savoir relève de la croyance.  Ce dernier illustrait son propos avec la théière en orbite entre Mars et la Terre. Il l’expliquait ainsi: « Si l’existence d’une théière était affirmée dans les livres anciens, enseignée comme vérité sacrée tous les dimanche matin, et inculquée dans l’esprit des enfants à l’école, hésiter à croire en son existence serait une excentricité au vaudrait au sceptique les soins du psychiatre  dans une époque éclairée ou de l’inquisiteur dans des temps plus reculés ». J’ajouterai que je crois à la théière orbitale, et que même je crois à ceux qui disent qu’elle possède comme Sature un anneau, sauf que c’est un cercle, mais un cercle carré, ou disent d’autres évangiles, un triangle rectangle. Vous n’y croyez pas, peut-être et moi, j’y crois. J’y crois, et comme pour toute croyance irrationnelle,  vous ne pouvez pas me prouver que cela n’existe pas. (Luis)

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 « C’est ce qu’exprime ce mot commun ; attribué à d’Alembert : allez en avant, et la foi vous viendra ; non pas une foi aveugle, machinale, produit irréfléchi de l’habitude, mais un acquiescement de l’esprit, fondé sur la perception simultanée d’un ensemble de rapports qui ne peuvent que successivement frapper l’attention du disciple et d’où résulte in faisceau d’inductions auxquelles la raison doit se rendre, en l’absence d’une démonstration logique que la nature des choses rend impossible »   (Essai sur les fondements de nos connaissances. A. Cournot. 1851)

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« Camarade, ne crois à rien ; n’accepte rien sans preuve. N’a jamais rien prouvé le sang des martyrs. Il n’est pas religion si folle qui n’ai eu les siens et qui n’ai suscité des convictions ardentes .C’est au nom de la foi qu’on meurt, et c’est au nom de la fois qu’on tue. L’appétit de savoir naît du doute. Cesse de croire et instruis- toi. L’on ne cherche jamais d’imposer qu’à défaut de preuves. Ne t’en laisse pas accroire. Ne te laisse pas imposer »   (Les nourritures terrestres. André Gide)

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Puis, je reviens sur le thème de « la grâce ». C’est là l’objet d’une vive polémique épistolaire entre Pascal et les Jésuites dans Les provinciales.

 Pour faire court, les Jésuites défendent la grâce suffisante, partant du fait que nous sommes tous les enfants de Dieu, que la bonté divine est sur tous et que nous accéderons à la vie éternelle si notre vie n’est pas une vie de péchés. Pour les Jansénistes, dont Pascal, la grâce ne peut être accordée qu’à ceux qui ont recherché Dieu, qui ont vécu dans la chrétienté et l’amour du Christ, c’est alors la grâce efficace. (Luis)

Dans Ecrits sur la grâce, Pascal explique : « Car si nous ne pouvons nous sauver sans Dieu, Dieu ne peut nous sauver sans nous »   (Cit, t.XI p 182/183)  

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« Quel merveilleux moyen que l’espoir et le merveilleux pour enchaîner les peuples à leurs croyances, car qui croit a peur, et qui a peur croit aveuglement » (Extrait de 2084. Boualem Salam. Gallimard 2015)

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« Il m’a toujours semblé naturel de défendre avec fermeté mes croyances, dans la mesure où je me sentais profondément engagé par elles. Si on considère nos croyances comme faisant partie intégrante de notre personnalité, changer de croyance revient à porter atteinte à l’intégrité de sa personne »  (Jacques Schlanger. Du bon usage de Montaigne)

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Souvent le philosophe écarte d’emblée tout ce qui ne se soumet pas à la raison, peut se révéler difficile à croire. Pour l’esprit cartésien, il ne saurait y avoir d’effet sans cause. Mais il demeure nombre de faits inexpliqués, des faits dont nous ne pouvons saisir les principes, ils relèvent alors de l’irrationnel, c’est le domaine de la métaphysique. Le besoin de savoir absolument, de connaître, peut nous entraîner vers l’irrationnel, lequel peut être un commerce lucratif. Sans être aussi catégorique que Voltaire : « L’astrologie est née quand le premier charlatan a rencontré le premier imbécile ». (Luis)

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« Tout croire est d’un imbécile et tout nier est d’un sot   (Charles Nodier)

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« Je pense qu’il est dangereux de préférer croire plutôt que d’avoir envie d’être libre »  (Nicolat Beuglet. Roman policier. Le cri. XO Editions 2016)

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«  Je comprends mal ces querelles furieuses entre ceux qui croient en un dieu transcendant, ou un dieu qui représente des forces surnaturelles, ou un dieu qui s’exprime par la bouche de la pythie … Cela importe si peu. Et ceux qui se prétendent athées ou agnostiques sont encore vaguement (quelque fois explicitement) une référence à un destin ou une fatalité, quand ils ne remplacent par le dieu traditionnel par leurs croyances dans la science. Ce mot croyance est central. Je ne dis pas que l’homme est un animal religieux, il est seulement croyant. Le mot « croire » s’applique à tout. Nous croyons tout et ce qui repose sur la croyance ; les vérités scientifiques ? Mais je suis obligé de croire, car je suis incapable de démontrer par moi-même ce qui a été démontré. Et dans les relations de la vie quotidienne, la croyance joue constamment un rôle premier ; il n’y a pas de communication possible,  pas la moindre conversation si je ne crois pas  ce que l’autre est en train de me dire. Même le désaccord, la discussion reposent sur la croyance que l’autre a dit quelque chose qui mérite d’être discuté : si je ne crois rien, je hausse les épaules, et je m’en vais »  (Jacques Ellul. Islam et judéo-christianisme)

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« On ne croit pas tour seul » : «  Nul homme n’est chrétien tout seul, pour lui-même, mais en référence et en lien à l’autre, dans une ouverture à une différence appelée et acceptée avec gratitude. Cette passion de l’autre n’est pas une nature primitive à retrouver, elle ne s’ajoute pas non plus comme une force de plus, ou un vêtement .à nos compétences et à nos acquis ; c’est une fragilité qui dépouille nos solidités et introduit dans nos forces nécessaires, les faiblesses de croire….                                           (Michel de Certeau. La faiblesse de croire)

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Le besoin de foi, de quelque absolu dans l’affirmation ou la négation, est un besoin de la faiblesse. L’homme de la croyance, le croyant de toute sorte, est nécessairement un homme dépendant »  (Nietzsche. L’antéchrist. Page 54)

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L’ame fatale dans une « disputation » face a un croyant, est parfois, la preuve ontologique (dit aussi argument ontologique) Il est évoqué pour la première fois par un philosophe romain, Boèce ; il sera repris par saint Anselme, puis par penseurs religieux, où philosophe acquis à la religion (Descartes, Pascal, Leibniz….)

Dieu est ce qu’il y a de plus grand, ce plus grand ne peut être que Dieu, et, si l’idée de Dieu est dans l’intellect,  de fait elle dans le réel. Ce qui sera traduit par des philosophes croyants : si j’ai l’idée de Dieu, cette idée n’a pas venir seule dans mon esprit, c’est donc, la preuve que Dieu existe.  Descartes ajoutera : « Toute la force de mon argument pour prononcer l’existence de Dieu, consiste à reconnaître que si j’ai en moi l’idée de Dieu, c’est que Dieu existe » de même qu’il écrira, si j’ai l’idée de la perfection, comme je ne suis pas parfait, mais que cette perfection existe, alors cette perfection ne peut être que Dieu. (Luis)

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Pari de Pascal : « Vous pariez sur l’existence de Dieu, il existe, vous gagnez tout ; vous n’avez pas investi grand-chose, vous ramassez le pactole. Vous refusez de parier, Dieu existe, là, vous perdez gros, vous ramassez une condamnation éternelle. Pour rafler la mise, obligation vous est faite de vivre selon les principes de la religion ». (Voir les deux films de Rohmer : Ma nuit chez Maud, et, Conte d’hiver)

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Diderot dans un texte « L’entretien philosophique avec Madame la maréchale de **** »

va parodier et se moquer du pari de Pascal.

– La Maréchale –N’êtes-vous pas Monsieur Diderot ?

– Diderot – Oui, Madame.

– La Maréchale –C’est donc vous qui ne croyez rien ?

– Diderot – Moi-même.

[….]

– La Maréchale – Que gagnez-vous donc à ne pas croire ?

– Diderot – Rien du tout Madame la Maréchale. Est-ce qu’on croit parce qu’il y a quelque           chose à gagner ?

– La Maréchale –  Je ne sais pas ; mais la question d’intérêt ne gâte rien aux affaires de ce monde ni de l’autre.

– Diderot – Pour moi, je mets à fonds perdu.

– La Maréchale – C’est la ressource des gueux.

– Diderot – M’aimeriez-vous usurier ?

– La maréchale – mais oui : on peut faire de l’usure avec Dieu tant qu’on veut ; on ne le ruine pas. Je sais que cela n’est pas délicat, mais qu’importe ? Comme le point est d’attraper le ciel, ou d’adresse ou de force, il faut tout porter en ligne de compte, ne négliger aucun profit. Hélas, nous aurons beau faire, notre mise sera toujours bien esquine en comparaison de la rentrée que nous attendons. Et vous n’attendez rien, vous ?

Diderot – Rien

« …si un misanthrope s’était proposé de faire le malheur du genre humain qu’aurait-il pu inventer de mieux que la croyance en un être incompréhensible, sur lequel les hommes n’auraient jamais pu s’entendre, et auquel ils auraient attaché plus d’importance que leur vie ? »   (Diderot. Entretien d’un philosophe avec Madame la Maréchale)

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« Mais la caste des croyants n’ayant jamais totalement renoncé à régir monde et les esprits, il suffirait de leur entrouvrir la porte pour qu’on ne puisse plus la refermer avant longtemps. Qui ne voit l’oppression des femmes sous la charia ? Les pressions insidieuses qui menacent l’avortement ? L’autocensure permanente quand il s’agit des religions ? L’interdiction du blasphème sous peine de procès, ou pire, de fatwas ? Diderot a d’abord connu la prison de Vincennes pour s’être moqué des autorités, et toute sa vie il a craint d’y retourner. Mais cela ne l’a pas empêché  de fourbir l’arme redoutable qu’est « l’encyclopédie » contre les marchands d’illusions et de superstitions…… Souvenons-nous des leçons de notre frère Diderot, il y va de nos libertés ».  (Elisabeth Badinter)

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« Ôtez la crainte de l’enfer à un chrétien, et vous lui ôterez sa croyance » (Diderot)

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« La croyance évite la régression à l’infini » (Montaigne. Essais. § XII) 

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« Il est très important de ne pas prendre de la ciguë pour du persil, mais nullement de croire ou ne pas croire en Dieu » (Diderot)

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« Si on nous demande qu’est cette chose sur laquelle nous marchons, nous répondrons précisément, c’est la terre. Un astre qui tourne autour du soleil…, est-ce  la  ferme croyance dans laquelle nous sommes ? Et de là, n’est-ce pas la réalité ? Mais dans le cas, où, nous aurions fait la même question à un homme six siècles avant J.C., sa réponse eut été bien différente. La Terre était la déesse mère, la déesse Déméter… »  (Schopenhauer. L’art d’avoir raison)

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« Les règles m’importent plus que la croyance

Je ne me défini pas comme croyant mais j’observe les rituels et les traditions du judaïsme ; le Shabbat  est bien plus qu’un jour de repos hebdomadaire : on renonce à sa volonté de transformer le monde, une modalité essentielle de la volonté de puissance.  C’est un moment éthique qui constitue l’un des fondements du judaïsme. Les bénédictions, notamment avant le repas, correspondent à un moment de réflexion, où l’on pense son activité. Emmanuel Levinas l’a bien montré : les multiples règles, aussi étonnantes soient-elles, ont le même but : elles vous font accéder au concept, à une vie sue le plan du concept et de la raison, ce qui est la marque d’une vie authentiquement humaine. Une vie qui ne des réduit pas à la Nature, aux instincts égoïste, mais une vie « sur-naturelle », qui est le reflet d’une transcendance. Pourtant la croyance en Dieu m’importe peu, et les pratiques du judaïsme ne m’apportent n aide ni réconfort. Le plus vital pour moi, réside dans l’étude je pense d’étudier quotidiennement le Talmud et autres écrits de sources juives ; Commencer par l’étude confère un contenu à la journée ; Cela m’élève, en m’amenant à me pose des questions sur la significations de l’humain. Le talmud évoque surtout des questions d’ordre juridique, de droit civil du travail, pénal, qui renvoie à des situations vieilles de plusieurs milliers d’années. Par exemple un homme qui emploie un ouvrier doit-il lui donner à manger ? Et si oui, quels aliments, en quelle quantité, dans quel lieu, etc,.. ? Les discussions que le talmud rapporte, les multiples points de vue que génère le commentaire talmudique possède une constante dimension éthique, comme l’a souligné Levinas, une figure primordiale pour moi.. ; Enfin l’étude du talmud est donnée comme un devoir à suivre, comme quelque chose qui est lié à l’identité juive. Dans le respect de ce devoir se trouve aussi la marque  de la transcendance. Mais cela ne relève pas forcément de la croyance » (David Hansel. Physicien. Article Philosophie magazine)

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« Les chrétiens se font tord de vouloir appuyer leur créance par des raisons humaines, qui ne se conçoivent que par la foy » (Essais. ! XII. Apologie de Raymond de Sebond)

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Evoquant ceux qui croient Pascal écrit (233-418) : «  Suivez la manière par où ils ont commencé : c’est en faisant tout comme s’ils croyaient, en prenant de l’eau bénite, en faisant dire des messes, etc.. Naturellement cela vous fera croire et vous abêtira – « Mais c’est ce que je crains »  – Et pourquoi ? qu’avez-vous à perdre ?

Il ajoute (234-577) « S’il ne fallait rien faire que pour le certain, on ne devrait rien faire pour la religion ; car elle n’est pas certaine. Mais combien de choses fait-on pour l’incertain, les voyages sur la mer, les batailles ! »

C’est là certaines compensations de la lecture si ennuyeuse des Pensées de Pascal, c’est qu’on y trouve de temps à autres de ces choses qui vous font sourire. (Luis)

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« Dans ma jeunesse et mon adolescence la religion en Espagne était un fait indiscutable pour l’immense majorité de la population. Ma famille n’était pas pratiquante, sauf dans les occasions sociales, et si ils étaient croyants c’était par inertie. Dans cette époque, appartenir à la religion catholique était naturel. Il suffisait de se laisser emporter par le courant….. Sortir de la religion, était sortir de la communauté, se convertir en ce nul ne voulait être, un drôle d’oiseau (voire, un monstre)… » (Eduardo Mendoza. Las barbas del profeta. Editor, Planeta. 2022)

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« Dîtes-moi ce que je veux entendre et je vous croirai » (?)

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« L’entendement humain, une fois qu’il s’est plu à certaines opinions (parce qu’elle sont reçues et retenues pour vrai ou, qu’elles sont agréables), entraîne tout le reste à les appuyer ou à les confirmer ; si fortes et nombreuses que soient les instances contraires, il ne les prend pas en compte, les méprise, ou les écarte et les rejette, par des distinctions qui conservent intacte l’autorité accordée aux premières conceptions, non sans une présomption grave et funeste. C’est pourquoi il répond correctement celui qui, voyant suspendu dans un temple les tableaux votifs de ceux qui s’éteint acquitté de leurs vœux, après avoir échappé au péril d’un naufrage, et pressé de dire si enfin il reconnaissait la puissance des dieux, demanda en retour : « Mais où sont peints ceux qui périrent sans avoir prononcé un vœu ? ».

C’est ainsi que procède presque toute superstition, en matière d’horoscopes, de songes, de présages, de vengeances divines, etc. Les hommes, infatués de ces apparences vaines, prêtent attention aux événements quand ils remplissent leur attente ; mais dans les cas contraires, de loin les lus fréquents, ils se détournent et passent outre » (Francis Bacon. Novum organum)

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