Idéalisme

< Retour au dictionnaire
Platon, dans l’école d’Athènes (Détail) Raphaël. 1508/1512. Musée du Vatican. Rome.

Le Grand Robert de la langue française : Attitude de l’esprit ou forme de caractère qui pousse à faire une large place à l’idéal, en accordant foi à la puissance de l’idée et du sentiment pour améliorer la nature et les sociétés humaines.

(Philo) Système philosophique qui sur le plan de l’existence ou de la connaissance ramène l’être à la pensée.

Encyclopédie d’éthique et de philosophie morale. PUF : Le mot est employé (notamment par Leibniz) pour désigner la philosophie de Platon en tant qu’elle est fondée sur la thèse selon laquelle la vraie réalité consiste dans les idées, par opposition aux choses matérielles dont la réalité changeante et précaire, ne serait qu’apparente. (Voir l’article)

Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Lalande : On doit distinguer deux formes entre lesquelles il y a souvent confusion :

1° Celle qui tend à ramener l’existence à la pensée individuelle. On l’appelle quelque fois, subjectivisme

2° Celle qui tend à réduire l’existence à la pensée en général.

Trésor de La langue française: (Philo) Toute philosophie qui ramène l’existence à l’idée. Courant philosophique qui rapporte tout ce qui est, dans la réalité de la pensée du sujet.
Le propre de l‘idéalisme est de ne pas admettre que la réalité externe soit la cause de nos représentations, soit qu’il nie cette réalité externe, soit qu’il en nie l’indépendance par  rapport à l’esprit (Kant), soit qu’il affirme que sa cause est l’idée (Platon).

(déalisme allemand) Ensemble de philosophie développées par des philosophes, à partir de Kant, par Fichte, Hegel, et Schelling)

Synonymes : Monde des idées. Platonisme

Contraires : Empirisme. Matérialisme. Pragmatisme. Réalisme. Réalité.

Par analogie : Âme. Chimère. Dualisme. Hypothèse. Idéalisme platonicien. Phénomène. Représentation. Spiritualisme.

*

« A Washington, Roosevelt s’était ouvert à moi des ambitions américaines drapées d’idéalisme mais pratiques en vérité »   (De gaulle. Mémoires de guerre)

*

«  Ainsi pour les idéalistes le monde possède un principe intelligible qui ne réside pas dans la seule nature matérielle des phénomènes. En plus de la réalité matérielle, les idéalistes croient à une entité invisible et immatérielle plus vraie et plus réelle que le monde. De fait l’idéalisme s’accompagne souvent d’une vision religieuse du monde. L’univers ne s’expliquerait pas seulement par la science et les lois physiques, mais il faudrait l’hypothèse d’un dieu créateur, ou ordonnateur du monde.
Voilà pourquoi les idéalistes pensent souvent que les êtres humains ont, en plus de leur corps, une qualité très particulière, que l’on appelle l’âme, qui n’est pas faite de matière – au contraire du cerveau – et, qui plus est, pourrait résister à la mort du corps. L’idéalisme suppose que le monde se coupe toujours en deux : les phénomènes apparents et la réalité cachée ; la matière et l’esprit ; le corps et l’âme ; etc. La philosophie a utilisé le mot de dualisme pour caractériser toutes ces séparations » (Intelligence du matérialisme. Benoît Schneckenburger. Editions de l’Épervier)

*

« …L’Idéalisme, c’est-à-dire, cette notion que l’étendu dans l’espace, le monde objectif, matériel, – entant que tel, – n’existe que dans notre représentation, et qu’il est faux, absurde même, de lui attribuer, en tant que tel, une existence en dehors de toute représentation, et en dehors du sujet connaissant, c’est-à-dire d’en voir le substrat dans une matière directement perçue et existant en soi…
La véritable philosophie doit donc être idéaliste ; il doit l’être pour être vraiment sincère….
Le réalisme, qui s’impose à l’entendement grossier, parce qu’il se donne comme positif, part en réalité d’une hypothèse gratuite, et n’est ainsi qu’un système en l’air ; il passe sous silence ou il nie le fait fondamental à savoir que tout ce que nous connaissons gît au sein de la conscience. Car affirmer que l’existence des choses est conditionnée par un sujet représentant, et par conséquent que le monde n’existe que comme représentation…   (Schopenhauer. Le monde comme volonté et come représentation)

*

« Il en résulte que vouloir atteindre l’essence intime des choses est une tentative illusoire […] Car la représentation n’atteint les choses que par le dehors, et par conséquent ne peut les pénétrer. Pour y arriver, il faudrait pouvoir nous placer à l’intérieur même des choses. Alors nous pourrions les connaître immédiatement… (Le monde comme volonté et come représentation. Schopenhauer)

*

Le véritable philosophe doit être idéaliste, il doit l’être pour être vraiment sincère.
Schopenhauer illustre ce sujet dans « le monde comme volonté et comme représentation » par ce dialogue imaginaire entre le sujet et la matière :
Le sujet: Je suis, et en dehors de moi, rien n’est. Car le monde est ma représentation.
La matière: Illusion téméraire ! C’est moi, moi qui suis; en dehors de moi, rien n’existe. Car le monde est ma forme passagère. Tu n’es que le résultat d’une partie de cette forme, ton existence n’est qu’un pur hasard.
Le sujet: Quelle sotte outrecuidance ! Ni toi, ni ta forme n’existeriez sans moi ; vous êtes conditionnés par moi. Quiconque me néglige et croit pouvoir encore penser est le jouet d’une grossière illusion ; car votre existence, en dehors de ma représentation, est une contradiction formelle, c’est un « fer en bois » ; vous « êtes » veut dire simplement que vous êtes représentés en moi. Ma représentation est le lieu de votre existence, et ainsi j’en suis la première condition.
La matière: Par bonheur, l’insolence de tes prétentions va être rabattue non par de simples mots, mais par la réalité elle-même. Encore quelques instants et tu n’existes plus, tu t’évanouis avec tes beaux discours, tu disparais comme une ombre, tu as le même destin que mes formes éphémères. Mais moi, je demeure intacte, jamais amoindrie, des milliers de siècle en milliers de siècles, à travers le temps infini, et j’assiste immuable au mouvement éternel de mes formes.
Le sujet: Ce temps infini, à travers lequel tu te vantes d’exister, comme l’espace infini, que tu remplis, n’existe que dans ma représentation, n’en est que la forme, que je porte toujours prête, dans laquelle tu te représentes, qui t’embrasse, et par laquelle tu existe. L’anéantissement dont tu me menaces ne m’atteint pas ; c’est toi qui disparaîtrais. Il n’atteint que l’individu, qui est mon support pendant quelques temps est qui est représenté par moi, comme tout le reste; (Le monde comme volonté et comme représentation. Schopenhauer. PUF 1942. Tome 2. Page 153/154)

*

Par définition l’idéalisme est la recherche, la volonté de réaliser un idéal. Réfuter cette idée c’est tomber dans son contraire, le réalisme ; lequel peut être une forme d’abandon, de manque de courage face à la vie, une propension a se laisser gouverner, une propension à l’esclavage, un rejet, voire une crainte devant l’idéal qui amène le conformisme, ce que nous décrit le philosophe Henri Pena Ruiz ; « Être réaliste, c’est tenir compte de la réalité telle qu’elle est. Être conformiste c’est s’en contenter. L’aspiration au changement est jugée irréaliste ou utopique par ceux qu’elle dérange : le qualificatif polémique prétend impossible ce qui n’est pas souhaité. Le conformisme réduit la réalité à sa configuration momentanée, qu’il feint de croire indépassable ». 

*

« L’idéalisme qui se fonde sur l’intelligence en soi, et le dogmatisme, qui se fonde sur la chose en soi, sont deux points de vue complets, symétriques. Le choix entre eux n’est pas de l’ordre de la démonstration, mais l’effet d’une préférence qui motive nos intérêts et nos tendances. Préférons-nous penser notre Moi comme une essence productrice ou comme un simple produit. Cela des hommes. Les uns sont de tempérament indépendant, ils ont besoin de croire à leur liberté ; les autres, dépendants dans leur pensée et leurs sentiments, trouvent leur esclavage commode et ont besoin de croire à leur impuissance. Les uns sont nés idéalistes, les autres sont des dogmatiques nés. Ainsi c’est le caractère de l’homme qui détermine son choix entre ces deux points de vue philosophiques. La philosophie que l’on choisit dépend de l’homme que l’on est »  (Schelling. La philosophie du Moi)

*

« Platon et le platonisme ne procèdent donc pas de la raison mais de la foi, non de la démonstration, mais de l’assertion, non de l’expérience mais de l’allégation, non de l’empirisme mais du péremptoire. Cette thèse ne vaut que tant qu’on lui porte crédit. Elle nécessite des agenouillés qui opinent u chef, pas des disciples dotés d’esprit critique » (Michel Onfray. La Conversion. Vivre selon Lucrèce. Robert Laffont. 2021)

< Retour au dictionnaire