Patrie

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La mère de la patrie. William-Adolphe Bouguereau. 1883. Coll. privée.

Le Grand Robert de la langue française : Nation, communauté politique à la quelle on appartient ou à la quelle on a le sentiment d’appartenir ; pays habité par cette communauté.

Trésor de la langue française : Pays de la communauté à laquelle on appartient (par la naissance ou par un attachement particulier) et dont l’histoire, la langue, la culture, les traditions, les habitudes de vie nous sont chères….
Patrie adoptive, seconde patrie ; région, pays auquel on est attaché par des liens puissants…
La communauté politique à laquelle on appartient dans son unité géographique, économique, historique, linguistique, culturelle.

Dictionnaire d’André Comte Sponville : Le pays dont on est originaire, où l’on est né,, où l’on vit, du moins pour la plupart des gens, où dont on se sait,  plus que d’aucun autre débiteur…Notion non pas objective, comme l’est davantage la nation , mais subjective et affective. J’i cru longtemps n’en avoir pas : la France m’était à peu près indifférente et je professai que les Intellectuels n’avaient pas davantage de patrie que les prolétaires… J’ai changé : la France m’est de plus en plus chère…

Encyclopédie de Diderot et d’Alembert : (Patrie) :… ce mot vient du latin, pater, qui représente un père & des enfans, & conséquemment qui exprime le sens que nous attachons à celui de la famille, de la société, d’état libre, dont nous sommes membres, & dont les lois assurent nos libertés  & notre bonheur. Il n’est point de Patrie sous le joug du despotisme. Dans le siècle passé, Colbert confondit aussi royaume & patrie ; enfin un moderne mieux instruit, a mis au jour une dissertation sur ce mot, dans laquelle il a fixé avec tant de goût & se vérité, la signification de ce terme, sa nature et l’idée qu’on doit s’en faire. [….]
Les Grecs et les Romains ne connoissoient rien de si aimable & de si sacré que la patrie ; ils disoient qu’on se doit tout entier à elle : qu’il n’est pas plus permis de s’en venger, que de son père : qu’il ne faut avoir d’amis que les siens ; que tous les augures, le meilleur est de combattre pour elle ; qu’il est beau, qu’il est doux de mourir pour elle ; que le ciel ne s’ouvre qu’à ceux qui l’on servie.
Ainsi parloient les magistrats, les guerriers & le peuple. Quelle idée se formoient-ils  donc de la patrie ?
La patrie disoient-ils, est une terre que tous les habitants sont intéressés à conserver, que personne ne veut quitter, parce qu’on n’abandonne pas son bonheur, & où les étrangers cherchent un asyle.
C’est une nourrice qui donne son lait avec autant de plaisir qu’on le reçoit. C’est un mere qui chérit tous ses enfants, qui ne les distingue qu’autant qu’ils se distinguent eux-mêmes ; qui veut qu’il y ai de l’opulence & de la médiocrité, mais point de pauvres ; des grands et des petits, mais personne d’opprimé ; qui même dans ce partage inégal conserve une sorte d’égalité, en ouvrant à tous les chemins des premières places […] C’est une puissance aussi ancienne que la société, fondée sur la nature, & l’ordre ; une puissance supérieure à toutes les puissances qu’elle établi dans sin sein, archontes, (magistrat grec), suffetes, (Magistrat de Carthage), éphores, (Magistrat de Sparte)  consuls ou rois ; une puissance qui soumet à ses lois ceux qui commande en son nom, comme ceux qui obéissent. C’est une divinité qui n’accepte des offrandes que pour les répandre, qui demande plus d’attachement que de crainte, qui sourit en faisant du bien, & qui soupire en lançant la foudre…. (Le chevalier de Jaucourt)

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Synonymes : Communauté. État. Nation. Pays.

Contraires : Apatride. Etranger. 

Par analogie : Carte d’identité. Compatriote. Civisme. Culture. Despotisme. Drapeau. Fronton: LibertéEgalité – France. Fraternité. Histoire.  Identité. Langue. Marseillaise. Mère patrie. Monument.  Origine. Pater. Patriotisme. Peuple. Territoire Traditions.

Expression : Amour sacré de la parie.

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« L’amour de la patrie conduit à la bonté des mœurs »  (Montesquieu. L’esprit des lois. Livre V. § II)

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« L’amour de l’égalité, dans une démocratie borne l’ambition au seul désir, de rendre à sa patrie les plus grands services…En naissant, on contracte envers elle une dette immense… »  (Montesquieu. De l’esprit des lois. Livre V, § III)

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«  L’Histoire nous a montré que cet amour de la patrie utilisé pour manipuler les peuples a pu avoir des graves conséquences. Cela a tellement marqué les esprits, que l’on peut entendre aujourd’hui des propos qui sont proches de la haine de la patrie. Cela est parfois proche d’une posture bien pensante assez « bobo », comme un honte d’appartenir à un pays, une culture, une langue.
Ces mêmes personnes, très critiques à l’égard de tout ce qui peut avoir une connotation la patrie, ou pire, la Nation, trouvent par ailleurs tout à fait normal que des pays comme les USA d’Amérique, exhibent presque systématiquement leur drapeau dans la plupart des films qu’ils produisent.
Ce sentiment anti-français qu’on voit chez certaines personnes va assez bien et est encourager par la vague d’individualisme, et fait l’affaire de l’ultra libéralisme qui cherche à détruire toute règle sociale propre à une nation, à un peuple.
Que de prévention lorsqu’est prononcé le mot patrie, et paradoxalement, quand vient une compétition de foot, européenne ou mondiale, on se retrouve avec des employés de banque déguisés avec des maillots genre équipe de France, de même dans les grandes surfaces, des employés sont transformés en pub, qu’ils le veuillent ou non. C’est un patriotisme du super business du foot, avec parfois récupération politique, une équipe qui gagne peut conforter, voire sauver un gouvernement ».  (Alain Finkielkraut. L’identité malheureuse. Stock. 2013)

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« Vive la France arc-en-ciel, unie et débarrassée de toutes ses peurs » (Abd Al Malik. Chanson : Soldat de plomb))

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« La patrie c’est ce qu’on aime et c’est une communauté de destin, le sentiment d’une communauté d’affection » expression souvent utilisée par Saint Just pendant la Révolution française »

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« …….. que s’est-il passé au lendemain du 13 novembre, des gens qui croyaient avoir dépassé le stade national, qui vivaient de plain pied dans le monde, ceux qui se pensaient de la génération du monde, se sont rendu compte au lendemain du Bataclan, que la France c’était pour eux une réalité et redevenait une patrie aimée, et ceci sous les coups d’un ennemi redoutable. Ils ont redécouvert la Marseillaise qu’ils ont entonné ou écouté avec émotion lors de la cérémonie des Invalides, et ils ont redécouvert le drapeau tricolore dont les soixante- huitards avaient eu à se moquer »  (Alain Finkielkraut. L’identité malheureuse. Stock 3013)

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 « J’ai cheminé de la carte d’identité, à mon identité française. Je me suis battu en 1968 contre le système…Bref des concepts me faisaient vibrer
Il n’y a pas de définition abstraire, « d’être Français », elle se défini par ses propres approches, par son vécu… »  (Alain Finkielkraut. L’identité malheureuse. Stock. 2013)

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La France c’est des monuments, voire des monuments aux morts, c’est une histoire, c’est un art de vivre, voire, des terrasses de cafés où des jeunes hommes et des jeunes femmes se rencontrent en toute liberté, sans contrainte ; sans contrainte sociales, politiques, ou religieuses.
La question se pose particulièrement dans une époque où croît une certaine francophobie acceptée, de bon ton, voire même encouragée par certains milieux.  Ce mot patrie, qui  est comme un lien affectif avec le pays où l’on est né, le pays où l’on vit, est devenu suspect, comme s’il était marqué du sceau de l’infamie  de crimes au nom d’un nationalisme raciste ? (Luis)   

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« La patriotisme est un sentiment moral souvent contesté. Certains estiment que l’amour du pays est inexpugnable, tandis que d’autres y voient une source de conformisme irréfléchi, de chauvinisme et de guerres. Notre question est plus spécifique : les individus ont-ils à l’égard des autres des obligations qui portent au-delà des devoirs qu’ils ont à l’endroit d’autres personnes dans le monde ? (Michael J. Sandel. Justice. § 9)

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« Il y a des jours comme ça où on aime la France, où on a envie de chanter la Marseillaise, envie d’être tricolore comme un supporter insupportable.
Il y a des jours où on se reproche de pas être assez français.
Des jours où on voudrait s’appeler Dupont quand on s’appelle Magyd.
Suis-je toqué ? Suis-je choqué ? Oui je laisse se répandre la douleur en mon cœur et reposer ma tête percutée de plein fouet.
C’était un carnage et c’est mon jour de baptême, je deviens solennellement français, c’est dit.
Je promets devant le fronton des mairies d’aimer la France pour le pire et le meilleur, de la protéger, de la chérir jusqu’au dernier souffle.

Suis-je sonné ? Miné ? Je nais.
Il y a des jours comme ça où même anar on porte un drapeau parce que c’est tout ce qui reste à brandir après l’embrasement et il est bleu blanc rouge.
Il y a des jours où on aime ce pays même quand il a tort, même quand il se trompe parce qu’il est nous jusque dans les entrailles.
Des jours comme ça où on aime ce pays, ses hameaux, ses villages, ses monuments aux morts.
Des jours où on regrette de pas la ménager la vieille dame aux quatre cent fromages.
Des jours où on préfère la justice à sa propre mère, des jours où on est à l’envers.
Des jours qui dépassent nos propres idéaux de liberté, d’égalité, de fraternité. Des jours plus forts que la vie et c’est des jours de mort.

C’est vrai, des jours comme ça où on reprocherait à Renaud, Ferré, Brassens d’avoir aimé que la France et pas assez la patrie.
Des jours où on voudrait être patriote sans attendre qu’un danger nous guette.  Avant le sang, avant le feu.
On devrait avoir envie de sauver la France avant les signaux d’alerte, avant que la mort ne vienne exhaler son odeur dégueulasse.

Allez ! Prenons les armes et sauvons ce trésor qui est la république et même la nation.
Il y a des jours comme ça où on est de droite, de gauche, de tous les bords tant qu’ils respectent le droit de pas être d’accord. On envie ce pays d’autant tolérer d’avis contraires, d’idées extrêmes et nauséabondes.
Des jours comme ça où on mesure l’état de droit, la liberté, le combat pour la laïcité qu’elle que soit sa maladresse. D’assumer les débats foireux de l’identité nationale, de dire oui à la France quelle qu’elle soit, de tout assumer, Pétain et Jean Moulin, le lâche et le héros, l’orfèvre et le bourrin, l’étroit comme l’iconoclaste ?
Des jours où Finkielkraut est un enfant de cœur, où le front national n’est qu’un adversaire de jeu.
Il y a des jours à lire Houellebecq pas pour ce qu’il écrit mais parce qu’il a peur !
Des jours à écouter Zemmour, Morano et Delon et la cohorte des dépités parce qu’ils perdent la boule.

Des jours comme ça où on veut s’acheter deux sapins, un pour la tradition, l’autre pour l’effort de porter ce pays qui essaie en trois mots de nous faire une place.
Des jours où on veut manger des crêpes à mardi gras et à Pâques du chocolat.
Des jours où même noir ou même musulman, on veut bien que nos ancêtres soient gaulois.
Des jours comme ça où on s’incline devant la tombe du soldat inconnu, où on rechigne pas à la minute de silence.

Des jours de fleurs pour tous les « morts pour la patrie » et qu’ils le soient au front ou l’arrière salle d’un restaurant.
Des jours où on choisit son camp parce qu’il y en a pas d’autres.
Des jours où on applaudit à tout rompre les uniformes, tous les gardiens de la paix, les paras et les flics. Ce jour là on aime les français quels qu’ils soient.
Des jours, mais il y en aura d’autres ».  (Chanson: Carnage. Magyd Cherfi, groupe Zebda)

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