Rite, rituel
Le Grand Robert de la langue Française : Ensemble de cérémonies du culte en usage dans une communauté religieuse.
Pratique réglée invariable, manière de faire habituellement.
Trésor de la langue française : Ensemble de prescriptions qui règlent la célébration du culte en usage dans une communauté religieuse.
– Geste, célébration prescrit(e) par la liturgie d’une religion.
– Pratiques réglées de caractère sacré ou symbolique.
– Pratique réglée; manière habituelle de faire.
Encyclopédie de la philosophie. Livre de poche. Dans un sens le plus courant, tout acte ou ensemble d’actes à l’accomplissement desquels président des normes rigoureusement codifiées..
Synonymes : Cérémonial. Cérémonie. Culte. Liturgie. Pratique.
Contraires : Occasionnel. Inhabituel.
Par analogie : Acte solennel. Autel. Baptême. Bar-Mitzvah. Bizutage. Circoncision. Communauté. Communion. Confrérie. Coutumes. Décorum. Esotérisme. Fêtes. Funérailles. Initiation. Intronisation. Liturgie. Mariage. Observance. Offrande. Profane. Protocole. Ordre. Sacrifice. Religion. Rite initiatique. Rite de passage. Sacré. Sacrifice. Secte. Symboles. Usages.
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Ce que nous appelons « l’âge ingrat » serait la conséquence pour certains psychologues de cette disparition de rite pour aider l’adolescent à sortir de l’enfance pour entrer dans l’âge adulte. « Face à l’angoissant flux de l’inexorable, les rites sont ici des balises rassurantes, scansions régulières d’une vie ordinaire.., ou extraordinaire » (Pierre-Henri Tavoillot. Philosophe. L’Homme et les rites)
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Le rite semble quelque chose aujourd’hui qui appartiendrait au passé, qui serait le fait de religions, des sociétés ésotériques, et pourtant le rite est présent sous divers formes. Le besoin de rituel a-t-on dit est « le pot de confiture des religions ». C’est la faiblesse des hommes qui sera toujours exploitée, soit par les religions, soit par les sectes, soit les coutumes. En effet l’homme a besoin de marquer des moments, par des étapes et actes solennelles de sa vie : la naissance, l’entrée dans la vie d’un enfant, le passage de l’enfance à l’adolescence, puis à l’adulte ; l’union avec un Être, le mariage, la constitution d’une famille, et surtout la mort.. L’homme a du mal à se quitter et n’accepte pas de quitter ce monde discrètement il lui faut penser qu’il sera une dernière fois honoré. Tous ces rituels sont des pansements, des cautères sur ce mal qui est le nôtre, nôtre finitude acquise au premier souffle. Les rites donnent comme un mode d’emploi pour passer des étapes, des balises pour aller l’inconnu.
Les rites ont été, et sont d’une infinie diversité, les écrits des anthropologues en sont riches, nous les voyons déjà dans les religions animistes, chez les païens, où les éléments divinisés de l’eau et du feu participent des rites.
Les rites existaient aussi bien dans les sociétés dites « primitives » ou encore « sauvages », qu’ils existent encore aujourd’hui dans le monde dit « moderne ». La majorité de ces rites sont liés à une communauté, spécifiques à cette communauté. On est membre de la communauté, du groupe, du clan, que si l’on respecte rites et coutumes. Ne pas respecter le rite propre à une communauté est déjà un peu s’en écarter, avec le risque d’en être rejeté. Dans des cultures comme chez les chinois, longtemps le rite a tenu une place prédominante sur la loi, de fait très souvent le rite se présente comme une loi. Loi indépassable, codification plus importante que la loi juridique.
Il y a dans le rite quelque chose au-delà de la simple coutume, au-delà de la simple observance religieuse, il y a quelque chose proche du symbole, le rite qui crée le lien avec les autres, avec ceux qui comme nous ont fait ces gestes du rituel. (Luis)
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Débat : « L’homme et les rituels » 14 octobre 2009
Introduction : Tous les sens que l’on a pu donner aux mots « rites et rituels » nécessitent un premier classement, des définitions. Une chose est l’origine du mot rite, le signifiant. Une autre est l’origine du signifié, en l’occurrence l’acte nommé rite. Le rite ayant existé avant le mot. Les significations, de plus, ont évolué avec la société et continuent d’évoluer.Nous avons deux catégories du rite, l’une religieuse, mystique, l’autre séculière et profane.
On donne comme définition du rite :
1° « Manière d’agir propre à un groupe social et revêtant un caractère invariable »,
2° « Ensemble de règles fixant le déroulement d’un cérémonial quelconque »,
3° « Pratiques, règles, manières de faire habituelles, parfois liées à la coutume ».
Quant au rituel il est : « La mise en œuvre des rites et l’ensemble des comportements codifiés, règles fixées par la tradition ».
Si l’on ajoute à cela que « rituellement » est utilisé pour « habituellement », nous avons là un large champ sémantique. On parlera de : célébration – cérémonial – coutume – décorum – étiquette – habitude – magie – messe – observance – protocole – sorcellerie – usage – tradition. Souvent, l’acte qui se répète chaque fois à l’identique devient un rituel. Celui-ci peut donc se retrouver dans nos actes les plus courants, les plus bénins ; c’est plus que l’habitude. On trouver des rites au sein d’une population, d’un groupe, d’une catégorie sociale ou religieuse, dans la famille, voire jusque dans le couple. Parfois ceux qui ont leurs petits rituels n’osent pas s’en écarter de peur de déranger l’ordre des choses, c’est presque un cérémonial névrotique, les gestes habituels qui rassurent…
Le rite religieux ou profane, qui unit au groupe, est une sorte de communion des individus. C’est faire quelque chose ensemble, en même temps, de la même manière, suivant des règles édictées qui viennent parfois des ancêtres. C’est quelque chose qui est une charpente de l’identité collective, de l’identité sociale, de cohésion ; dans ce respect de la règle codifiée, c’est une des nécessités du « vivre ensemble », c’est être acteur et spectateur de moments qui créent du lien social et du temps social. Ce sont là « Les temps forts de la vie collective ou la société prend conscience de soi et se pose » (Durkheim).
Alors ! Pourquoi au 21ème siècle, le maintien des rites ? : Cela est-il dû à notre sens grégaire : « Tout le monde fait comme ça ! » ? A des superstitions ? A des peurs ancestrales ? A une anxiété existentielle ? A une nécessaire reconnaissance des normes du groupe ? A un besoin d’être « ensemble » ? Et, enfin, peut-on imaginer un jour l’homme « sans rite » ? (Luis)
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Le rituel peut être dans des petits gestes. C’est alors des usages ritualisés ou encore de micro-rituels : « Disposer avec symétrie le couvert, aligner les coquilles de beurre dans le ravier, s’affairer, avec ce sérieux que les femmes d’ordre mettent à accomplir les rites domestiques les plus inutiles » (Roger Martin du Gard. Les Thibault. 1936).
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Le mot « rite » ne sera dans notre langue française que vers le 15ème siècle. Le « ritus » latin qui venait du Sanskrit « riti », devient pour nous « rite ». Au 17ème siècle, les philosophes académiques (catholiques) soutiennent que le rite ne peut être d’origine païenne et qu’il n’est que d’ordre divin, se référant en cela à des auteurs comme Saint Chrysostome (4ème siècle) ou au philosophe juif andalou Maïmonide (12ème siècle) et son « Livre des égarés ». Ils accusent Spencer de blasphème, de parjure, pour son œuvre « La raison des rites » en 1885. Spencer pourtant tire ses arguments de la Bible (Livre III) : « Dieu adopta nombre de rites que leur antiquité et l’usage des nations avaient rendus vénérables, parce qu’il estimait qu’il s’agissait d’inepties tolérables ». Pour lui, les premiers rites qui sont dans des sociétés païennes, animistes, ont souvent été recyclés par les religions monothéistes ; le rite fut d’abord magique avant que d’être religieux. « Il n’y a pas de religion sans magie » (Claude Levy-Strauss).
Dans certains pays d’Afrique, comme au Cameroun, les femmes sont enterrées en robe blanche. Pendant plusieurs années les magasins Tati avaient vu pour cette raison grimper leur chiffre d’affaire sur ce produit.
Lorsque le mari meurt dans ce même pays, la veuve est rasée des chevilles jusqu’au sommet du crâne, et tous les miroirs sont retournés ou cachés par un voile. (Luis)
La table chez les Latins est un rituel de fêtes, de grandes occasions, avec ses plats liés aux évènements. Dans bien des pays il existe une cuisine festive, des plats spécifiques à des fêtes, à des moments rituels. Pas de « thanks giving » sans dinde, pas de Noêl sans bûche, pas de fêtes des rois, sans manger une part du gâteau, el roscón de reyes. La variété de ces plats participant ou, même parfois est base d’un rituel, est immense, elle nous parle de nos cultures, de nos cultures si différentes. Les rites, les rituels font partie de tout notre patrimoine culturel. (Luis)
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Nous avons souvent évoqué le rite de purification, le rite du bouc émissaire, lequel, chargé de tous les péchés des citoyens, était rejeté hors de la cité. Ainsi il était le rédempteur, il purifiait les individus.
Chez les Hébreux, le bouc est le Azazel : « Selon l’ordre de Yaveh à Moïse, Aaron rentrera dans le sanctuaire….Du sang du premier bouc, il aspergera l’autel…, il le rendra pur et sacré, séparé des souillures des enfants d’Israël. Puis il approchera de l’autre bouc et confessera sur lui toutes les transgressions des enfants d’Israël. Il l’enverra ensuite dans le désert et le bouc emportera avec lui toutes les fautes… » (Lévitique § 16).
De la naissance à la mort, la vie est accompagnée, marquée, à chaque étape importante, par le rituel : peu ou pas de société vivant sans rituel. Il semblerait que notre modernité tend à réduire la part du rituel, car dans de nombreux cas les rituels sont une des barrières devant l’inéluctable modernisation, face à une culture globalisante. Mais malgré cela la communication mondiale, les images généralisées, influent sur le rituel : ainsi dans des pays ayant des rituels ancestraux on voit par exemple : le père Noël sous toutes les latitudes, le mariage à l’occidental, « la robe blanche, les grains de riz…..) qui remplace le mariage traditionnel, Dans les mariages mixtes de deux cultures différentes, on fait parfois deux mariages pour sauvegarder les rituels des deux coutumes. Le rituel marque la solennité d’un événement, il y a là du sacré, du sacré qui n’est nécessairement religieux, le rituel dans le mariage, sacralise l’homme et la femme, le rituel est une spiritualité. (Luis)
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Chez les Inuits, le premier gibier, la première prise d’un adolescent était donné en cadeau à la femme qui avait accouché leur mère ; un lien entre les différents passages de la vie. Ce présent était remis suivant un rite précis : « La femme invitait ses amies, elles recevaient le jeune homme assises en cercle, poussaient des cris de joie à son arrivée, soulevaient le pan avant de leur vêtement afin de lui faire voir la peau de leur ventre, et écartaient les jambes pour lui faire voir leur grande vilaine chose en bas de leur ventre…. » (Van Genep. Les rites de passage 1909). Un exemple parmi tant d’autres qui nous montre que le rite existe en dehors de toute idée religieuse…(Luis)
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Les rites ont l’objet d’étude de bien des ethnologues : et ils ne manquent pas de nous surprendre. Aux Etats-Unis dans une religion très stricte, les anabaptistes Amish, pratiquent le rite de passage, le « Rumspringa ». L’adolescent va rentrer dans le monde adulte, les jeunes hommes vont alors quitter momentanément la communauté, ils porteront des vêtements modernes, ils pourront boire de l’alcool, fumer, etc…Les jeunes femmes seront autorisées, non pas à sortir de la communauté, mais pendant cette période, elles peuvent porter une jupe, se maquiller. A l’issue de cette Rumspringa, ils peuvent recevoir le baptème… (Luis)
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Au Sénégal dans les villages, les anciens qui détiennent le pouvoir et vont décider quels sont les jeunes hommes qui vont accéder au statut d’hommes qui pourront se marier, recevoir de la terre, c’est le « Boukout ». Là aussi, comme dans beaucoup de rites de passage, il y a une période d’isolement avant la cérémonie initiatique, puis ensuite une fête.
Chez les gitans « Roms » le garçon doit enlever sa fiancée, les jeunes gens disparaissent un jour ou deux, puisque lorsqu’ils reviennent on procède au mariage. C’est là un rituel que l’on trouvait déjà dans les « Veda » texte antique indien. Ce rituel existe également en Afrique.. Des rituels disparaissent, d’autres se créent, concert de rock géant, match de foot, meeting, tous ces grands rassemblement confèrent du rite. De triste mémoire nous nous rappelons de grandes manifestations nazies de Nuremberg, des forêts de drapeaux, des milliers de torches, des chants, une foule en communion, ce fut aussi du rituel. La plupart des rites font appel à une mise en scène. (Luis)
Rituels
Rituel communion
Inconsciente et magique
Manipulation ?
La frontière est si fragile
Et la chaleur peut brûler
Sur le bûcher des hérétiques
J’ai versé le vin de messe
Je croyais que les flammes
Eclairaient le monde
Alors j’ai dansé la pluie
Sur la pointe des pieds
J’ai cherché mon chemin
Dans la fumée de l’encens
Hareng saur, fumé, crucifié
Je me suis fait poisson
Noyé dans le bénitier
Florence Desvergnes
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Il y a dans les rituels qui marquent la solennité d’un événement, il y a là du sacré qui n’est nullement religieux, le rituel, va sacraliser l’homme ou la femme. (Luis)
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Les occasions rituelles les plus connues sont :
La naissance, le baptême, circoncision, excision (hélas encore pratiquée) .
La puberté Première communion, Bar Mitzvah, confirmation
La fécondité, fiançailles, mariage
La mort, enterrement, crémation.
Les rites de passage
Grandes écoles, bizutage. Passages de grades sociétés ésotériques. Intronisation dans les confréries. …..
Et tous les innombrables rituels de pas le monde ;
L’homme sans aucun rituel, aurait-il encore son humanité ?
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Nous avons vu comment les révolutionnaire de 1793 voulant et ayant supprimé les rites religieux, devraient trouver d’autres formes de rituels pour inscrire dans le temps des événements exceptionnels. C’est ainsi que le révolutionnaire Camille Desmoulins imaginera un rite laïc bien proche du rituel religieux, en l’occurrence, le baptême.
« … .la liberté des cultes étant décrétée par la Constitution, et que par un décret de l’Assemblée législative au mode de constater l’état civil des citoyens autrement que par des cérémonies religieuses, il doit être élevé, dans chaque municipalité, un autel sur lequel le père, assisté de deux témoins présentera à la Patrie ses enfants… (Camille Desmoulins. Journal de Vervins. 1884)