Stoïcisme, stoïciens
Encyclopédie de la philosophie. La Pochothèque : Ecole philosophique grecque fondé à Athènes par Zénon de Cittium vers 300 av notre ère. Son premier siège a d’abord été la Stoa Poikilè, c’est- à-dire, le « Portique peint ». On distingue généralement trois périodes dans l’histoire du stoïcisme : époque dite de l’ancien stoïcisme, celle de Zénon, Cléanthe d’Assos, 331 – 230, et Chrisyppe de Soles 278 – 206 av. notre ère.
Puis la période, « moyen stoïcisme» des 1er et 2ème s. av notre ère, avec Zénon de Tarse, Diogène de Babylone, Antipater de Tarse.
Puis, le stoïcisme romain avec les œuvres de Sénèque, d’Epictète et de Marc Aurèle.
Zénon donnait des cours de façon assez informelle sous une colonne ornée de peintures qui se trouvait sur la place publique d’Athènes, lieu appelé « le portique bariolé » en grec Stoa poikilê, et les adeptes oi stoikoi, qui nous donnera le terme Stoïque.
Vocabulaire technique et critique de la philosophie Lalande : B) Caractère moral du sage selon le stoïcisme, en particulier indifférence à la douleur, fermeté d’âme opposée aux mots de la vie.
Dictionnaire historique de la langue française. Alain Rey : (Stoïque) …le mot passe dans un vocabulaire psychologiquement moderne, désignant une personne qui manifeste une austérité digne de celle des philosophes anciens […] La locution « à la stoïque », « avec austérité » (1596) est sortie d’usage comme emploi du nom au masculin pour désigner la philosophie de Zénon. Le dérivé stoïquement signifie « avec un courage stoïque »…… selon La Bruyère désigne : la doctrine de Zénon selon laquelle le bonheur est dans la vertu et qui professe l’indifférence devant ce qui affecte la sensibilité,…
Le grand Robert de la langue française : Philosophie de Zénon de Citium et de ses disciple, notamment sur le plan moral, doctrine selon laquelle le bonheur est dans la vertu, et qui professe l’indifférence devant ce qui affecte la sensibilité (notamment la fermeté devant la douleur)
Synonymes : Austérité. Courage. Héroïsme. Impassible.
Contraires :
Par analogie : Ascétisme. Dur. Ferme. Héroïque. Indifférent. Inébranlable. Insensible. Maîtrise de soi. Patient. Rigide. Rude. Sévère. Spartiate. Tranquille.
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Pour les Stoïciens c’est la vertu qui fait le bonheur, plus de vertu égal plus de bonheur. Pour les épicuriens, plus de bonheur égal plus de vertu.
Le stoïcisme est synonyme de maîtrise de soi.
Les quatre vertus cardinales du stoïcisme sont : Sagesse – Courage – Justice – Modération
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Contexte politique et social :
Toute philosophie est étroitement liée à son époque de création, de principal rayonnement. Pour les Stoïciens cela nous mène de 300 avant notre ère, jusqu’à 300 après. De la puissante Grèce jusqu’à la domination de Rome, c’est-à-dire à ce basculement entre deux grandes civilisations qui sont nos référence culturelles.
Le contexte politique d’alors, les expériences politiques des Grecques créent un climat en recherche d’orientation, d’objectif, de projet de société. Après le Gouvernement des Aristocrates, la tyrannie sous Pisistrate, la démocratie du siècle de Périclès, avec les lois citoyennes de Solon le législateur et ami de Protagoras le sophiste. Après la défaite d’Athènes devant Sparte, le mauvais souvenir de l’instauration du gouvernement « des trente », qui deviendront les trente tyrans, après Alexandre ayant soumis tout le moyen orient et organisé son royaume, une guerre des petits chefs s’installe. En Grèce se sont les officiers des campagnes les « Diadoques » qui deviennent de véritables petits rois et vont se faire la guerre, alors l’Empire d’Alexandre éclate, c’est ce que nous appellerions aujourd’hui « balkanisation ». Il n’y a plus d’état centralisateur, la démocratie n’est plus, des minis royaumes se créent, des ligues. La Grèce est devenue un ensemble où le pouvoir est éclaté, il est partout et nulle part. Malgré quelques résistances la Grèce va tomber comme un fruit mûr, ou un fruit blet, sous la domination des Romains. Les empereurs romains qui se réclament de la démocratie se comportent aussi souvent en tyrans. Les Romains sont eux aussi passés par des périodes troubles. Les Républiques romaines n’ont pas mieux réussi que la démocratie athénienne, après des empereurs comme Néron et Caligula, ils sont dans une période de doute sur la grandeur de Rome. Scipion, ami du Stoïcien Panétius (ou Panaitios) est attiré par le stoïcisme dans sa dimension universaliste, avec déjà l’idée d’un gouvernement du monde. L’Empire romain c’est une partie de l’Europe, tout le tour de la méditerranée et une partie de l’Asie mineure. Les Romains ont perdu leur identité ; les dieux de la mythologie sont déchus, une nouvelle religion, religion monothéiste arrive, encore un énorme bouleversement. Nous sommes en plein choc de civilisations ! En pleine rupture des valeurs ? Dans ces périodes troubles les peuples sont à l’écoute de ceux qui montreraient une autre voie. Les Stoïciens qui recommandent tout à la foi la vertu et le souci de soi vont aller dans le sens de l’attende, des aspirations des individus désorientés. Le transfert de cette philosophie dans l’empire romain se fera par le Grec Panétius de Rhodes lequel prendra la direction de l’école stoïcienne. Si ce dernier prolonge le Stoïcisme de Zénon, son propos a évolué, toujours l’inévitable rapport avec son époque, ne condamnant aucune école, il se réclame tout autant d’Aristote que de Platon et n’exclut aucun courant, c’est le philosophe de cette nouvelle sagesse : l’éclectisme…Cette philosophie va pénétrer diverses couches sociales, des esclaves jusqu’à l’empereur Marc Aurèle. Il restera surtout les écrits de Sénèque, qui seront redécouverts vers le 15 ème siècle lesquels offriront une autre philosophie grecque que Platon et Aristote, les seuls connus ou enseignés jusqu’alors. (Luis)
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« Est stoïque celui qui demeure impavide face à des avanies de toutes sortes – la douleur – les insultes – les infortunes du destin – la mort enfin. …le sage accède ainsi à un permanent bonheur, maîtrisant ses passions et jouissant avec mesure des plaisirs de la vie…Comment passer de nos premières tendances à la sagesse ? » Les Stoïciens posent aussi la question « Faut-il ou non s’engager dans la société ? Mais les stoïciens sont ceux qui ont cherché à faire du « souci de soi » le plus sûr moyen de la découverte du monde… La grammaire par exemple est une discipline qui a été presque entièrement inventée par les Stoïciens ; ils furent en effet les premiers à développer une théorie des lettres et des syllabes, et à distinguer, noms, verbes, conjonctions et articles, et surtout pour des raisons philosophiques à distinguer le nom propre du nom commun. Des notions de morale, comme le devoir apparaissent avec les Stoïciens …. , ils croient en général que la vertu est le seul bien, le vice le seul mal, et que tout le reste est indifférent…cette thèse peut paraître très théorique et un peu insensible, car elle nous détache de l’affection pour nos proches, par exemple. Mais cette thèse a surtout une fonction pratique : rendre la paix de l’âme à l’homme quelles que soient les circonstances… (Magazine littéraire N° 461 février 2007)
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Le philosophe austère, est né dans la Scythe,
se proposant de vivre une pus douce vie,
Voyagea chez les Grecs, et vit en certains lieux
Un sage assez semblable au vieillard de Virgile
Homme égalant les rois, homme approchant des dieux
Et comme ces derniers, satisfait et tranquille
Son bonheur consistait aux beautés d’un jardin.
Le scythe l’y trouva, qui la serpe à la main
De ses arbres à fruits retirait l’inutile
Ebranchait, émondait, ôtait ceci, cela.
Corrigeant partout la Nature
Excessive à payer ses soins avec usure.
Le Scythe alors demanda :
Pourquoi cette ruine : Etait-il un homme sage
De mutiler ainsi ces pauvres habitants ?
Quittez-moi votre serpe, instrument de dommage ;
Laissez agir la faux du temps
Ils iront aussitôt border le noir rivage.
J’ôte le superflu, dit l’autre, et l’abattant,
Le reste en profite autant.
Le Scythe retourné dans sa triste demeure,
Prend la serpe à son tour, coupe et taille à toute heure ;
Conseille à ses voisins, prescrit à ses amis,
un universel abattis.
Il ôte de chez lui les branches les plus belles,
Il tronque son verger, contre tout
Sans observer temps ni saison
Lunes ni vieilles, ni nouvelles.
Tout languit et tout meurt. Ce Scythe exprime bien
Un indiscret stoïcien :celui-ci retranche de l’âme
Désirs et passions, le bon et le mauvais.
Jusqu’aux plus innocents souhaits
Contre de tels gens, quant à moi je réclame.
ils ôtent à nos cœurs le principal ressort.
Ils font cesser de vivre avant que l’on soit morte raison,
Le philosophe Schythe. La Fontaine)
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« Un trait distinctif du stoïcisme est son cosmopolitisme. Les hommes sont une manifestation de l’esprit universel et devraient, selon les stoïciens, vivre dans un rapport d’amour fraternel et d’entraide mutuelle. Ils tenaient les différences extérieures, comme le rang ou la richesse, pour négligeables dans les relations sociales. C’est ainsi qu’avant l’essor du christianisme, les stoïciens reconnaissaient et préconisaient la fraternité entre les hommes et l’égalité naturelle de tous les êtres humains. …… l’école des stoïciens prolongea le courant antérieur des cyniques, qui rejetaient les institutions sociales et les valeurs matérielles…..La différence essentielle entre les deux écoles provient de ce que les cyniques nourrissent du mépris pour le monde matériel extérieur, alors que les stoïciens privilégient l’indifférence ». (Encyclopédie Microsoft® Encarta.) *
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Stoïcisme :
Rappelle-toi ce fier précepte des ancêtres
fais d’abord ton devoir qui seul dépend de toi ;
tranquille pour le reste obéis à la loi
qui régit sans amour tout ce troupeau des Etres.
Garde ferme en ton cœur, pour la lutte ici-bas,
l’orgueil dernier appui de cette race humaine.
Fais ton devoir d’abord et par quoi qu’il advienne,
Soit le héros qui tombe et ne déserte pas !
Poème de Jules Lahor. 1888.
(Extrait de l’ouvrage, l’Illusion)
(Document bibliothèque nationale de France)
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« L’amour des autres hommes me rend heureux, et ce sentiment est incarné dans ma nature, non pas parce qu’il y a une loi divine qui impose d’aimer…L’homme est l’être suprême de l’homme. Dieu n’est qu’une création de l’égoïsme humain ». (Max Stirner. 1852)
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« Pour les stoïciens, le respect d’autrui est une vertuque la raison nous fait reconnaître comme nécessaire ; il n’implique pas un lien affectif, au contraire, il s’agit en s’y appliquant d’éviter le plus possible l’emprise de l’affectivité, de l’émotion sur la raison ». (Dict. Ethique et philo morale. Puf).
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Pour les Stoïciens toutes choses sont liées, tout est en tout, nous sommes liées à tout l’univers. Une goutte de vin qui tombe dans la mer se répand dans tous les océans dit Chrysippe, il y a un sentiment d’intimité, comme le traduit William Blake :
« Voir le monde dans un grain de sable
Le ciel dans une fleur des champs
L’infinité dans le creux de la main,
Et l’éternité dans une heure ».
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Les stoïciens sont des précurseurs en matière de développement personnel (technique ou théorie à la mode : DP). C’est parce que vous ne maîtrisez ni vos pensées, ni vos émotions, ni vos humeurs, ni vos passions, que vous n’avez pas de solution.
La solution ! Commentez intérieurement les remous de votre âme : répétez-vous ; tiens ! je suis en colère ! Et votre colère baissera d’un cran. C’est une cure par la parole intérieure ; mettre des mots sur vos émotions vide ces dernières de leur capacité de nuire. (Luis)
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Pour les Stoïciens, c’est pécher par manque de sagesse que de s’attacher aux êtres et aux choses idée que l’on retrouve également chez les Bouddhistes. Lorsqu’on sait tous les emprunts des grecs dans les textes indiens comme « les Véda » (entre 1500 et 1800 avant notre ère), il n’est pas si surprenant que le bouddhisme et le stoïcisme aient des points communs : pour les premiers c’est le nirvana détachement de soi, la sérénité du corps comme de l’esprit, pour les seconds, c’est accéder à absence de désir et de souffrance, c’est l’apathie ! Cette sagesse influencera des philosophes modernes à commencer par Montaigne, puis Pascal et Descartes Nous retrouvons chez nombre de philosophes cette volonté de détachement qui serait la sagesse suprême : « C’est malhonnêteté », nous dit Pascal (Les pensées) « d’accepter l’amour de l’autre, car je sais que je suis mortel, et que, acceptant cet amour, je suis responsable du chagrin qu’il pourra avoir après ma mort », nous retrouvons le discours d’Epictète, ce détachement : Si tu aimes un pot de terre, dis-toi : ‘J’aime un pot de terre.’ S’il se casse, tu n’en feras pas une maladie. En serrant dans tes bras ton enfant ou ta femme, dis-toi : ‘J’embrasse un être humain.’ S’ils viennent à mourir, tu n’en seras pas autrement bouleversé. » (Manuel d’Epictète, VIII). Il y a là déterminisme et fatalisme, c’est supporte et abstient toi ! C’est aussi l’Apathie : (En Grec apatheia) « impassibilité », absence de passion », terme caractéristique de la pensée stoïcienne, qui voit dans l’état d’apathie la réalisation de la plus grande sérénité de l’âme.., elle affranchit du désordre et des excès des sentiments. Si les Stoïciens font de l’apathie une des règles de leur philosophie, cette expression d’apathie avait déjà utilisée par Aristote comme refus d’être affecté de nouveau par un même évènement. (Luis)
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Celui qui donne son accord à la nature est heureux. La recherche du plaisir est exclue. Ou, le plaisir est contraire à l’ordre du monde et il est impossible, ou, il lui est conforme et nous n’obtenons pas le plaisir mais le bonheur. Suivre l’ordre du monde, c’est suivre la raison. Vivre selon la nature est vivre selon l’ordre du monde, l’ordre des choses. Pour eux nous sommes ou vertueux, ou brigands, selon notre nature, que nous ne pouvons pas changer. Le stoïcisme va aboutir à un indifférentisme et un ascétisme. Le sage est heureux partout, même dans les pires douleurs car son bonheur est de vouloir la seule nécessité. Mais ils sont aussi précurseurs dans d’autres domaines. La grammaire par exemple est une discipline qui a été presque entièrement inventée par les Stoïciens ; ils furent en effet les premiers à développer une théorie des lettres et des syllabes, et à distinguer, noms, verbes, conjonctions et articles, et surtout pour des raisons philosophiques à distinguer le nom propre du nom commun. Même si parfois ils reprennent des points de la philosophie d’Epicure, ils diffèrent sur le fait qu’ils ne reconnaissent pas la théorie des atomes, et qu’ils prônent le déterminisme. (Luis)
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Dans de nombreux ouvrages anciens ont a présenté les Stoïciens comme les précurseurs des chrétiens On évoque souvent le fait que les Stoïciens romains avaient subi l’influence de cette nouvelle religion, à moins qu’ils n’aient alors inspiré fortement le christianisme naissant. Les Stoïciens bien avant les apôtres avaient professé la solidarité, l’amour de l’autre, de son prochain.., des auteurs diront alors «… le Stoïcisme était devenu la religion de tous ceux qui n’en avaient plus, et ceux-là étaient l’immense majorité des citoyens romains devenus indifférents aux antiques légendes des dieux d’Hellade et de Rome ». (Jules Barri publie « Les martyrs de la libre pensée. 1850)
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« Maintenant j’en reviens à la question que tu veux examiner : comment nous en arrivons à la conception initiale du bien et de la rectitude morale. La nature ne peut pas nous l’avoir enseignée ; elle ne nous en a pas donné de connaissance, mais des semences de connaissance. Certains soutiennent que le concept est venu à notre connaissance par hasard. Mais il est proprement incroyable que quiconque ait rencontré la forme de vertu fortuitement. Notre école soutien que ce sont l’observation et la comparaison mutuelle d’actes souvent accomplis qui ont constitué cette notion. Selon l’avis de nos philosophes, la rectitude morale et le bien sont saisis par analogie… Nous connaissions la santé du corps, à partir de là, nous avons formé la notion qu’il existe une santé de l’esprit…. Certains actes de générosité, d’humanité ou de courage nous avaient étonnés. Nous avons commencé à les admirer comme s’ils étaient parfaits. Mais ils avaient beaucoup de défauts en dessous, cachés par l’apparence brillante d’un haut fait. Nous les avons négligés. La nature nous invite à porter aux nues les actions admirables…, de tels faits nous avons donc tiré l’idée d’un bien immense » (Sénèque. Lettres. 120)
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Essai sur les Stoïciens.
J’ai fermé la porte de cette citadelle
Je suis un homme parfait, un sage ! Comme ils disent !
Le vol d’une hirondelle, au pas la haridelle !
Destin marche, je te suis, oracle ! Comme ils disent
Le labyrinthe de mes pensées interlopes
A égaré bien des dictateurs, je suis libre !
Plus rien ne peut m’atteindre. Si les enveloppes
sont fragiles, Parques* vous pouvez tisser, libre
A vous, j’ai lâché prise, le destin haridelle
J’ai posé la bride sur son cou, mes passions
Je les fais danser au cœur de la citadelle
Valse le monde autour, j’ai donné l’impulsion
Libre, je maîtrise, je me laisse bercer
Les passions clapotent, la toile du destin
Brille, douce comme la soie, pourquoi lutter
L’immaîtrisable est là, C’est le plus beau festin
Au menu, ma foi : plus de rate au court bouillon
Dictatorial ? Je suis libre ! Pauvre couillon !
* Les Parques ou Moires, (mythologie) sont trois sœurs. Elles tiennent le fil de la vie : Clotho tient la quenouille, Lachésis la met sur le fuseau, Atropos coupe le fil.
Florence Desvergnes
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…..d’après les Stoïciens le pur hasard n’existe pas, c’est un mot dont nous couvrons notre ignorance. Le hasard n’est que la rencontre de phénomènes prédestinés. Nous sommes dans un monde nécessaire, « Rien ne peut fléchir les arrêts du destin, il ne peut se contraindre lui-même, et serait se contredire que de ne plus vouloir ce qu’il a voulu » (Sénèque). Tout est donc nécessaire, il n’y a dans ce monde rien de contingent que par rapport à notre ignorance.
L’avenir est donc certain… (Essai sur le libre arbitre. 1887. Georges L Fonsegrive. Professeur de philo au lycée de Bordeaux) (Doc B N F)
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« Selon les Stoïciens, il n’y a rien entre la vertu et le vice, alors que les Péripatéticiens disent qu’entre eux il y là progrès. Car comme le disent les Stoïciens, de même qu’un bâton doit être droit ou tordu, de même un homme doit être juste ou injuste…… » (Diogène Laërce VII,127)
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« Oui disent les Stoïciens, mais celui qui est dans la mer une coudée sous la surface ne se noie pas moins que celui qui a coulé de cinq cents brasses, de même ceux qui sont arrivés tout près de la vertu ne sont pas moins dans un état de vice que ceux qui en sont éloignés…. » (Plutarque. Des notions communes 1063 A-B)
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« Eux aussi, Zénon et Chrysippe,* affirmaient que tout est soumis au destin, avec l’exemple suivant. Quant un chien est attaché à une charrette, s’il veut la suivre, il est tiré et il la suit, faisant coïncider son acte spontané avec la nécessité ; mais s’il ne veut pas la suivre, il y sera contraint dans tous les cas. De même en est-il avec les hommes : même s’ils ne veulent pas, ils seront dans les cas contraints de suivre leur destin ».* Philosophes stoïciens. (Hippolyte. Réfutation des hérésies. I.21)
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« …Car si un homme avait en vue d’arriver à envoyer une lance ou une flèche droit sur quelque chose, qu’il fasse tout ce qui est en son pouvoir pour y arriver tout droit correspondrait à notre doctrine du souverain bien. Dans une comparaison de ce genre, l’homme doit tout faire pour y arriver tout droit. Et cependant le fait qu’il fasse tout pour atteindre son objectif sera sa fin, pour ainsi dire, analogue à ce que nous appelons le bien suprême dans la vie. Le fait d’atteindre… qu’il faut désirer ». (Cicéron. Des termes extrêmes des biens et des maux III, 22)
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Pour les Stoïciens l’homme est comme emporté par son destin. Il est comme le chien attaché derrière la carriole, il croit choisir son rythme…
Les stoïciens refusent d’associer bonheur et plaisir comme Epicure. Seule la vertu mène au bonheur. Ils ne croient pas aux atomes, comme l’évoque Epicure. Ils croient au destin, Epicure n’y croit pas.
Raisonner son optimisme ou son pessimisme revient à maîtriser toutes ses émotions, ses pulsions, ses sentiments. C’est ce que pratiquent les Stoïciens par l’exercice de la volonté, mais cela peut s’avérer être aussi « l’encéphalo plat » des sentiments!
Le sage dit Diogène Laërce, est sans passion, parce qu’il ne se laisse pas entraîner. Le sage est sans orgueil, la gloire lui est égale. Tous les sages sont sévères, c’est qu’ils ne conversent pas pour le plaisir. Les âges sont sincères et attentifs à se montrer sous leur meilleur jour, leur meilleur aspect…
Le philosophe stoïcien Panétius né à Rhodes passa une partie de sa vie à Rome 185/110 av J.C. Il fut envoyé comme ambassadeur à Rome en 169. Nous pouvons envisager l’engagement politique tel qu’il l’avait défini alors : « Réalisation de soi dans l’engagement pour le bonheur de tous », ce que les philosophes nommeront aussi « Eudaimonia », le bonheur des hommes comme but suprême de la politique.
La philosophie des Stoïques est celle de l’acceptation, de la résignation, une philosophie de temps de crise.
Pour les Stoïciens l’homme a une vocation sociale au sein de la communauté, le philosophe a un devoir politique, mais il ne peut exercer d’activité politique Il est celui qui exige le principe moral dans la politique.
Les trois dogmes du Stoïcisme sont :
1° Ne rien affirmer en temps qu’idée qui ne soit objectif, vérité réelle, avérée…, jugement de fait et non jugement de valeur.
2° Se fixer comme but le bien être de la communauté humaine (l’Humanisme)
3° Confronter ses désirs à la réalité. (Luis)
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« Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les jugements relatifs aux choses » (Sénèque)
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« La morale stoïcienne est donc un système de protection, elle ressemble beaucoup à ce que les psychiatres appelleront, en notre siècle, un ensemble de « mécanismes de défense du moi ». Du moins sous la forme la plus facile celle qui consiste à réduire toute la morale à l’art de tuer l’affectivité pour ne pas souffrir, c’est-à-dire, casser le thermomètre pour ne pas ressentir la chaleur ou le froid excessifs. C’est sous cette forme caricaturale que le stoïcisme fut souvent l’objet de moquerie. La morale stoïcienne semble avoir été faite essentiellement pour les inquiets, soucieux de construire une attitude permettant un minimum de vulnérabilité sur le plan affectif… » (Histoire de la philosophie occidentale. Jean-François Revel. P, 337. Poche .1968)
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Les stoïciens sont « les gardiens de la forteresse de l’âme »
Les Stoïciens nous montrent que nous devons vivre l’âme ou l’esprit tourné vers les autres, et également l’âme, l’esprit tourné vers soi, « discuter avec son âme » nous dit Sénèque ou passer devant « le tribunal de sa conscience » Voir le monde se voir, se connaître et puis en tirer éventuellement les leçons.
Ce sont véritablement les Stoïciens qui donnent le sens le plus courant au mot « philosophe », combien de fois avons-nous entendu « il faut se faire une philosophie », « il faut être philosophe » (Luis)
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« Pour accéder à la sagesse, il faut opérer une séparation entre deux domaines : les choses qui dépendent de nous et celles qui n’en dépendent pas, et nous attacher uniquement à celles qui dépendent de nous. Le sage est libre même en prison. L’homme, livré sans la moindre défense aux revers de la fortune et aux accidents de la vie, peut toujours juger conformément à la raison. Au sein d’une situation tragique, l’indépendance du sage demeure possible si l’on édifie en soi une citadelle intérieure où l’on trouvera la liberté. Que l’on songe à Marc-Aurèle, qui bâtit en lui-même une citadelle inaccessible aux troubles des sentiments et des passions, ces mouvements irrationnels de l’âme contraires à la nature. En ce lieu règnent l’apathie ou l’ataraxie, cette tranquillité de l’âme que rien ne vient troubler » (Sénèque)
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« L’action risque donc d’introduire le souci de l’incertitude dans la mesure même où il cherche à faire le bien. Mais c’est précisément en prenant conscience de la valeur de cette intention de bien que le Stoïcien va retrouver la paix et la sérénité qui lui permettra d’agir efficacement. Cela n’a rien d’étonnant, c’est-à-dire dans l’intention de bien faire que se situe pour lui le bien. Puisque précisément c’est dans le bien moral. La valeur absolue c’est l’intention morale. (Pierre Hadot. Marc Aurèle. La citadelle de l’âme)
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« De toutes choses qui sont, les unes sont en nous, les autres non…Donques, les choses qui sont en nous sont libres.., et ne peuvent estre empéchées….Mais celles qui sont en nous ne peuvent estre empéchées et idées comme choses alienes et qui ne sont nostres. Si les choses qui sont alienes, tu les cuydes propres, tu te trouveras empesté et te méconteras de Dieu et des hommes. Mais si tu cuydes seulement les choses tiennes, personne ne t’emparera, personne ni te nuyra, et ni n’aura point d’ennemi ». Nous sommes devant l’œuvre traduite qui fut en latin lecture et connaissance des plus importantes des Stoïciens de Montaigne jusqu’aux philosophes des Lumières. « Le manuel d’Epictète » Traduicte en langue françoyse par Antoine du Moulin Malcommois. Lyon. 1546. (Bibliothèque Nationale de France. Vieux livres rares)
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En 1850 un philosophe, Jules Barri publie « Les martyrs de la libre pensée »
« …Voilà ce qu’était le césarisme qu’on voudrait réhabiliter aujourd’hui afin de nous faire accepter plus docilement sa copie. Eh bien ! C’est cette peste que les Stoïciens combattirent autant qu’il fut en eux, au péril même de leur vie. Je demandais tout à l’heure combien de citoyens avaient su résister à la tyrannie impériale, il y en eut cependant quelques uns, et ce furent les Stoïciens. Ceux-ci du moins protestèrent, par leurs leçons et leurs exemples contre les dépravations, et contre la servilité. Que si ces exemples restent impuissants, ils en offrent pas moins un consolant spectacle. L’âme se sent soulagée à la vue de ces caractères qu’aucun despotisme ne peut flétrir, qu’aucune corruption ne peut atteindre, et qui seuls restent debout quand tout s’aplatit et se dégrade autour d’eux. Toute dignité humaine n’est pas perdue. A côté de ce troupeau sans nom, il y a encore des hommes ». Il faut quand même préciser que si nous lisons Tite Live et les « Révolutions romaines » tous ne furent pas aussi vindicatifs.
Nous trouvons dans ce même texte d’autres approches qui réhabilitent à nos yeux, si l’en était besoin les Stoïciens : « Si Socrate reconnaissait aux esclaves les mêmes vertus qu’aux autres citoyens, les Stoïciens étaient opposés à l’esclavage…ils introduisaient dans le lien conjugal l’égalité homme femme, à l’encontre du droit romain ». Pour le Stoïcien Chrysostome, celui qui fait travailler un esclave est assimilé au « prostitueur » ! (Jules Barri « Les martyrs de la libre pensée. 1850)
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Montesquieu qui étudiera les Stoïciens, va les nommer comme l’on fait pendant des siècles les philosophes asservi à l’Eglise, « de « secte ». Il montre toutefois le stoïcisme en exemple : « Elle seule savait faire les citoyens, elle seule savait faire les grands hommes ». Nous retrouverons cette appellation de secte depuis les pères de l’Eglise jusqu’aux Lumières et mêmes après. Cela n’est pas pur hasard si chez tous les philosophes européens du moyen-âge nous voyons toujours en dehors de Platon et d’Aristote les écoles grecques de philosophie traitées de « sectes ». Les philosophes ou théologiens de ces époques ont une telle haine à l’égard des Stoïciens qu’ils en perdent le sens de la vérité, nous trouvons dans un ouvrage qui parlent d’eux : « Comparaison de la doctrine des anciens et des nouveaux philosophes » écrit par le philosophe, Abbé Pelvert. 1787, « Platon et Pythagore admettaient une première et suprême intelligence qui s’était déchargée sur son fils, principale émanation de sa substance au contraire des Stoïciens qui faisaient de la nature … ».
Dans de nombreux ouvrages anciens ont a présenté les Stoïciens comme les précurseurs des chrétiens, et cette religion n’aura de cesse de les considérer comme une secte.. Ce sera entre autres Thomas Moore, dans Utopia, et David Hume,… On évoque souvent le fait que les Stoïciens romains avaient subi l’influence de cette nouvelle religion, à moins qu’ils n’aient alors inspiré fortement le christianisme naissant. Les Stoïciens bien avant les apôtres avaient professé la solidarité, l’amour de l’autre, de son prochain.., des auteurs diront alors « que le Stoïcisme était devenu la religion de tous ceux qui n’en avaient plus, et ceux-là étaient l’immense majorité des citoyens romains devenus indifférents aux antiques légendes des dieux d’Hellade et de Rome ». (Luis)
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« L’individu se doit-il, ni troublé, ni courroucé pour quelconque adversité ? » (Oresme)
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« Le seul bonheur est de convenir à notre destinée ». Personnage de Philippe le Bel, dans « Les Rois maudits ». (Œuvre de Maurice Druon)
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« Connaître dit Zénon, c’est avoir des sensations. De la sensation viennent nos idées, elles seules réunissent les matériaux sur lesquels l’entendement s’opère. Rien n’est pensé qui n’a d’abord été perçu » On évoquera la foi des Stoïciens, foi en la vertu possible de l’homme, en son sens morale dans ses aptitudes à se dépasser ». La polémique d’Aristote. Henri Pierre Cazac 1889. Tarbes.
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« Le fondateur du Stoïcisme Zénon de Cittium (322/264) avait d’ailleurs la bonté d’étendre à son propre esclave les bénéfices de son enseignement. En effet, cet esclave volait. Zénon lui donna du fouet. L’esclave lui dit : « C’est mon destin qui m’a poussé à voler.- Et à être battu aussi » répondit le maître ». Histoire de la philosophie occidentale. Jean-François Revel. Page 338/339. Poche 1968)
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« J’ai me toujours mieux ce qui arrive, car je suis persuadé que ce que Dieu veut est meilleur pour moy que ce que je veux. Je m’attache donc à luy, je le suis, je règle sur luy mes désir, mes mouvements, mes volontés, mes craintes, en un mot je veux ce qu’il veut » (Epictète. Nouveau manuel, livre quatrième)