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Culpabilité

Phèdre. Alexandre Cabanel. Musée Fabre, Montpellier

Grand Robert de la langue française : Sentiment par lequel on se sent coupable, qu’on le soit réellement ou pas.

Encyclopédie de la philosophie (Pochothèque) : (Psych.) Sentiment, état d’âme désagréable consécutif à une action, qui, à juste titre ou non,  est vécue par le sujet comme répréhensible ; ou bien sentiment global de culpabilité sans rapport à une action particulière ; ou enfin ; état pulsionnel inconscient qui pousse le sujet à s’infliger, d’une manière ou d’une autre, une punition. C’est dans cette dernière acception que Freud a étudié le sentiment de culpabilité, dont il relève la présence dans les rêves de punition, dans les symptômes de la névrose obsessionnelle.

Synonymes : Accusation. Responsabilité. Faute.

Contraires : Innocence.

Par analogie : Absolution.  Aveu. Caïn. Confession. Conscience. Conséquence. Crime. Délit. Honte. Infamie. Injustice. Jugement. . Offense. Mentir. Pardon. Péché. Préjudice. Regret. Rémission. Remord. Réparation. Repentir. Ressentiment. Peine.  Punition. Sacrilège. Sentiment. Tourment. Transgression. Tribunal. Tristesse. Tuer. Vengeance. Voler.

Expression : Battre sa coulpe. Complexe de culpabilité. Mea culpa (c’est ma faute)

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« Il n’est permis d’imposer quelque peine à autrui, à autre dessein que de corriger le coupable ou de rendre meilleur ceux à qui le supplice servira d’exemple.., la vengeance qui ne gouverne pas l’avenir procède d’une vaine gloire ». (Thomas Hobbes)

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« La première punition, c’est qu’aucun coupable ne peut s’absoudre à son propre tribunal »  (Juvénal. Satyre XIII)

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« Le philosophe allemand existentialiste Karl Jaspers, dans son livre où il évoque la culpabilité allemande à la suite de la deuxième guerre mondiale, en relève quatre forme :
1° La culpabilité criminelle ; les crimes sont objectivement établis et relèvent du tribunal chargé de faire respecter les lois civiles aux quelles elle renvoie clairement.
2° La culpabilité politique ; «  Elle réside dans les actes des hommes d’Etat, je dois assumer les conséquences des actes accomplis par cet Etat,  à la puissance duquel je suis subordonné et dont l’ordre me permet de vivre », en ce sens, cette responsabilité est à la fois collective, et individuelle, chaque citoyen portant en lui la responsabilité dans la manière dont l’Etat est géré. Dans un tel contexte s’affrontent droit naturel et droit des gens.
3° La culpabilité morale ; elle est individuelle et renvoie à la responsabilité qui est la mienne dans la mesure où je suis moralement responsable des actes que j’accomplis. Jaspers insiste : «  C’est vrai que tous mes actes, même politiques et militaires. La formule « un ordre est un ordre » ne peut jamais avoir valeur décisive». Je suis toujours responsable dans la mesure où je décide d’agir ou pas. Il ajoute : «  Un crime est un crie même s’il a été ordonné, (bien que, selon le degré de danger, de coercition tyrannique et de terreur, on puisse admettre des circonstances atténuantes, et de même tout acte reste soumis au jugement moral ». Le tribunal en charge de cette responsabilité, c’est la conscience intérieure, à laquelle nul n’échappe, c’est « La communication avec l’ami et le prochain, avec le frère humain capable d’aimer et de s’intéresser à mon âme ».
La culpabilité  métaphysique, liée à la condition humaine : celle qui permet de ne pas rester insensible à la douleur d’autrui, de ne pas rester sans réaction face à un crime commis sous ses yeux, celle qui me donne l’occasion de pas être lâche ; elle qui combat l’indifférence. Culpabilité au seul fait d’être humain, elle est à la fois individuelle et collective, expression d’un sentiment moral. Kral Jaspers aura à ce propos ces lots d’une gravité solennelle.

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«  Quelque part,  dans la profondeur des rapports humains, s’impose une exigence absolue, en cas d’attaque criminelle,  ou de conditions de vie menaçant l’être physique, n’accepter de vivre ensemble ou pas du tout; c’est qui fait la substance même de l’âme humaine. Mais il n’en est ainsi ni dans la communauté  de tous les hommes, ni parmi les citoyens d’un Etat, ni même à l’intérieur de groupes plus petits ; la solidarité reste limitée aux liens les plus étroits, et c’est qui fait notre culpabilité à tous » (Elsa Godart. En finir avec la culpabilisation sociale. Albin Michel. 2021)

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Mon mal vient de plus loin. A peine au fils d’Egé
sous les lois de l’hymen je m’étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait s’être affermi
Athènes me montrait mon superbe ennemi :

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler,
Je sentis tout mon corps et transir et brûler.
Je reconnu Vénus et ses feux redoutables,
D’un sang qu’elle poursuit, tourments inévitables
Par des vœux assidus je cru les détourner
Je lui bâtis un temple et pris soin de l’orner ;
De victime moi-même à toute heure entourée
D’un incurable amour, remèdes impuissants !
En vain sur les autels, ma main brûlait l’encens,
Quand ma bouche implorait le nom de la déesse
J’adorais Hippolyte ; et, le voyant sans cesse,
même au pied des autels que je votais fumer,
j’offrais tout à ce dieu que je n’osais nommer

…….

J’ai conçu pour mon crime une juste terreur
J’ai pris la vie en haine et ma flamme en horreur ;
Je voulais en mourant prendre soin de ma gloire ;
Je n’ai pas pu soutenir tes larmes, tes combats ;
e t’ai tout avoué ; je ne m’en repens pas
JPourvu que de ma mort, respectant les approches,
Tu ne m’affliges plus par d’injustes reproches
Et que tes vains secours cessent de rappeler
Un reste de chaleur tout prêt à s’exhaler
(Phèdre. Racine)

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« Si l’on revient au récit biblique, le mal, et donc la culpabilité entendue comme expression d’un sentiment terriblement humain, est présent dès l’origine de l’humanité. La culpabilité n’est pas issue d’une certaine culture, d’une certaine éducation, conséquence d’un certain surmoi ; elle est inhérente à la nature humaine […..] Le sentiment d’injustice est profondément humain, alors que le meurtre qui suit la barbarie, le déshumanise (le meurtre étant la négation de l’autre, la négation de l’humanité. Et ce qui permet à Caïn de rester humain, de se maintenir malgré tout dans l’humanité, c’est justement sa culpabilité.
La culpabilité est d’une certaine façon ce qui nous sauve d’une certaine déshumanisation » (Elsa Godart. En finir avec la culpabilité sociale. Albin Michel. (2021)

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